lundi 16 décembre 2013

la randonneuse et les balises #5



J’ai une tendresse particulière pour les cairns, ces tas de cailloux qui balisent certains sentiers, remplaçant avantageusement des traits de peinture. Pour un tas de raisons.

D’abord, parce qu’ils me rappellent les livres de Frison-Roche qui se déroulent au Sahara, à travers lesquels je les ai découverts. Mais pas du tout me diront les  spécialistes, dans ces livres-là l’auteur parlent de redjem, pas de cairns. Et bien j’insiste. Quand l’ai lu La montagne aux écritures, je ne savais pas ce qu’était un redjem.  J’ai demandé à mon père qui a eu cette réponse lumineuse : « c’est un cairn ». Et bien je vous l’avoue, je ne me suis pas sentie éclairée.  Je ne savais pas ce qu’était un cairn. Bon…

Ensuite, le cairn est pour moi une image de la solidarité. La coutume veut, en passant, d’ajouter une pierre sur le petit tas qui se présente à vous, transformant ainsi un monticule en véritable sémaphore !

Un bel exemple de cairn résultant de la solidarité d’un groupe, mais aussi de son orgueil, est celui bâti par un village gallois dans le film l’anglais qui gravit une colline et descendit une montagne. Des villageois, vexés qu’on qualifie le relief au nom imprononçable jouxtant leur village de colline au prétexte qu’il lui manque 100 ou 200 m de haut, bâtissent en son sommet un gigantesque cairn qui permettra qu’on la requalifie en montagne…

Une petite recherche m’a fait découvrir que le cairn date du fond des âges, du néolithique, ou des tas de pierres recouvrant des sépultures étaient appelées de ce nom, comme le cairn de Barnenez. Cela  ne rend les cairns que plus sympathiques !

Les cairns ne sont souvent pas que de simples tas de pierres, ils donnent l’occasion à la créativité des marcheurs de s’exprimer. 

Ainsi ce monticule orné de branches en Corse :

Ce cairn un peu équilibriste au Puigmal d’Err : 


Cette véritable œuvre d’art toujours en Corse : 


Alors quand des cairns sont abattus par des randonneurs indélicats, je suis comme Idéfix devant un arbre tombé : je pleure. Entre le lac des Bouillouses et l’étang Bleu, les cairns avaient subis de graves dommages. J’en ai réparé plus d’un, au grand dam de mon compagnon un peu agacé de s’arrêter aussi souvent ! 







Je fais finir sur une note triste, vous présentant un cairn émouvant rencontré sur le flan du Cambre d’Aze : 

 Comment ne pas voir là l’hommage de proches d’un disparu à son amour de la montagne ?

Ici s’achève cette série de billets sur mes aventures avec les balises de randonnée. Si j’ai pu vous donner envie de chausser vos meilleures chaussures et d’aller mettre un pied devant l’autre au long des chemins et sentiers, j’en suis heureuse.





lundi 9 décembre 2013

la randonneuse et les balises #4


Coucou ! Me revoici le long des sentiers, carte à la main bien sûr, en train de chercher les marques qui me mèneront au bout de ma randonnée !

Mais les balises peuvent être facétieuses, trop belles pour être vraies, redondantes, effrayantes…

Si vous marchez en Auvergne, entre le Puy gros et la Banne d’Ordanche, vous pouvez tomber comme ce fut notre cas sur ces indications : 



Là c’est carrément la panique ! Parce que vous n’avez aucune intention d’aller à Rome ; parce que vous ne savez plus quelle direction prendre. Bien sûr un bon vieux proverbe vous vient à l’esprit, mais le risque d’un looooong détour pour arriver au sommet  de la Banne d’Ordanche, avec les kilomètres qu’on sent déjà dans les pieds, vous enthousiasme peu… Et puis tous les chemins mènent-ils à ce volcan ? Si ça marche avec Rome, concernant la banne d’Ordanche rien n’est moins sûr ! Et bien rebelote, comme dans un épisode précédent, on analyse la carte (IGN) et on trouve… à gauche !

J’ai déjà évoqué les cairns, et j’ai  l’intention d’y revenir, dans un billet qui leur sera spécialement consacré. Mais j’ai rencontré un jour une balise sur un cairn :

Cette redondance m’inquiète : prendrait-on les randonneurs pour des assistés, incapable de suivre des cairns sur une portion de sentier ? A moins que le monde moderne n’ait encore frappé : le baliseur a posé son trait jaune pour éviter le procès intenté par un marcheur vraiment mauvais qui se serait perdu ?

La balise, c’est d’abord un trait de peinture sur un arbre, une pierre, un mur… J’avoue ne pas aimer en rencontrer de trop belles, trop explicites, pas assez sauvage. Comme à l’entrée de la vallée de Chaudefour :


La civilisation devient alors trop présente.

Dans le Lot, aux environ de Rocamadour, émergeant d’un brouillard léger, nous sommes tombés sur une balise qui nous a beaucoup alarmés : 


Qu’a-t-il bien pu se passer ? Le baliseur a-t-il égorgé un loup et laissé là le sang de l’animal ? Ou bien lui-même se vidait-il de son sang après avoir été agressé par un ours ? Un marcheur perdu dans le brouillard, après des heures d’errance, a peut-être laissé là une dernière parque de son passage ?

D’autres marques dégoulinantes du même genre ont augmenté notre angoisse : et si un sérial killer sévissait là ? Risquions-nous de nous trouver nez à nez avec le Tueur du Sentier de l’Alzou ?

Vous vous doutez que si je vous le raconte aujourd’hui, c’est bien que la rencontre n’eut pas lieu. Mais j’en tremble encore…

Enfin, je ne résiste pas au plaisir de vous dévoiler la plus alléchante balise jamais rencontrée, au sortir des gorges de Carança: 


Bon, le truc qu'elle ne dit pas, cette balise affriolante, c'est le dénivelé qui reste à faire, et surtout la pente bien raide ! C'est vrai qu'une fois vaincue (et oui, c'est comme les côtes, en montagne les descentes aussi sont à vaincre) on est ravis de trouver ce bar...



lundi 2 décembre 2013

la randonneuse et les balises #3


Une balise de randonnée, ça sert à trouver son chemin. Alors, pour remplir son rôle, elle doit être claire, explicite, au bon endroit. Sinon, le pire est à craindre… Savez-vous qu’il n’y a pas plus agacé qu’un randonneur qui erre depuis des heures dans une forêt (j’aime bien la forêt dans cette anecdote : difficile d’y avoir des repères visuels quand on ne la connait pas…) à la recherche de la balise salvatrice ? On en a vu capables de mordre dans cette situation pour le moins… inconfortable.

Voici donc quelques situations vécues qui auraient pu tourner au carnage…

Le bûcheron morvandiau qui a coupé ce chêne, découpé les tronçons portant les célèbres bandes rouge et blanc, et les a placés bien en évidence sur une souche se méfiait sans doute…

 Ou alors c’était simplement un homme serviable et gentil avec les marcheurs, qui sait ?

Quand vous promenez votre sac à dos dans un coin que vous ne connaissez pas, guide en main, que penser devant de telles indications :



A droite ou à gauche ? Dans notre cas (eh oui nous étions deux ce jour-là), c’était à gauche…  Mais avouez tout de même que ce n’est pas de bol que deux sentiers « GR de pays » se frôlent au même endroit, imposant ces deux balises perturbantes ! Alors je vous rappelle une règle simple : en plus de connaître la couleur des marques à suivre, n’oubliez pas la carte qui vous tirera d’affaire ! Personnellement je suis une inconditionnelle des IGN, étant tombée dedans quand j’étais petite… Ceux qui sont visés par cette phrase se reconnaitront.

Tout bon  baliseur le sait, il faut repasser de temps en temps. Sinon, avec la pluie, le froid et la poussée de l’arbre année après année, tout passe, tout s’efface. La plaisante randonnée devient alors une course à la balise ! Un petit exemple dans la vallée de Chevreuse :








Ce jour-là, nous n'avons vraiment pas eu l'impression de profiter du charme de la forêt, qui est indéniable; nous avons affuté nos lunettes pour nous assurer en permanence d'être au bon endroit...


Un autre exemple: dans le Morvan, qui montre bien ce que j'ai déjà écrit dans une nouvelle: un arbre, ça a l'air immuable, et ce n'est pas vrai du tout, ça change !





C'est tout pour aujourd'hui. Mais rassurez-vous chers amis, les aventures ne sont pas finies, je reviens dans quelques jours,  avec un ou deux cas rigolos. 

billet numéro 1 ici
biller numéro 2