mardi 12 septembre 2023

Les lectures de saison

 


Dans les magazines, on vous parle des « livres d’été », de la rentrée littéraire, de la « saison des prix ». Bien sûr on ne parle de pas de « livres d’hiver » ou de « livres de printemps », mais l’ordonnancement des parutions, avec la « rentrée » de janvier instille cette idée dans nos esprits.

Deux saisons m‘énervent : celle des « livres d’été » et celle des prix littéraires.

Commençons par tordre le cou aux livres d’été : il s’agit le plus souvent de livres léger, de livres feel good ou de polars, comme cette sélection de Elle où s’est bizarrement glissé le dernier roman de Pierre Lemaître, paru à la « rentrée » de janvier.

L’idée sous-jacente c’est : l’été c’est fait pour décompresser, alors on ne va quand même pas proposer des livres prises de tête ! Mais ces magazines ne font pas de propositions pour ceux qui voient les choses à l’envers : l’été, le cerveau est moins sollicité par les soucis du quotidien, profitons-en pour quelques lectures un peu ardues que je n’aurais pas oser affronter dans la grande fatigue de la fin de l’hiver.

Il est vrai que je lis des polars en été, pas trop de livres feel good car ce n’est pas mon truc. Je lis aussi des romans légers en été. Mais j’en lis toute l’année !

La saison des prix littéraires est aussi un moment désespérant. La presse ne parle plus que de cela (enfin, dans le sujet « livres », hein), et donc renforce l’exposition médiatique de romans qui n’en ont plus besoin, et omet souvent de parler de livres d’auteurs moins connus qui se révèlent à la lecture de vraies pépites. Les prix littéraires participent par ailleurs de cette société de compétition ou on met en scène des « héros », des « personnes exceptionnelles », dans le sport, l’économie, l’art et tant d’autres domaines.

Alors oui je lis des prix littéraires, mais je suis aussi à l’affût de livres plus confidentiels, sur lesquels les libraires mettent des cœurs en disant « untel a aimé » et souvent en disant pourquoi.

Et toutes ces lectures, je les répartis sur l’année ! Il y a des moments pour les livres à succès, des moments pour les polars, des moments pour les classiques, des moments pour ce livre dont la couverture énigmatique m’a attirée, des moment pour ce livre qui attend depuis si longtemps dans ma PAL, des moment pour…

Et rien de tout cela n’est prévisible. Le 10 novembre de l’année x sera consacrée à un roman léger et celui de l’année suivante à la lecture d’un essai. C’est juste une question de moment, certains parlent de rencontre entre le lecteur et le livre. En tous cas, rien à voir avec la météo 😉

Il n’y a plus de saison, mon pov’monsieur !

samedi 22 juillet 2023

Et au deuxième trimestre 2023 ?

 


Un nouveau trimestre s’est achevé il y a quelques semaines, il est temps d’en dresser mon bilan littéraire.

J’ai lu de bons livres, j’ai aussi connu deux abandons dont Berta Ilsa, de Javier Marías. Deux tentatives avec cet auteur très apprécié deux échecs : il n’est donc pas pour moi. Voilà, il faut juste l’accepter.

L’autre essai concernait Russel Banks, qui venait de mourir. J’ai chois un recueil de nouvelles disponible dans ma médiathèque : je n’ai pas accroché.

Dans mes réussites de lecture se trouvait La peste, d’Albert Camus. J’imagine qu’il n’est pas utile de vous faire un compte-rendu de cette lecture… Une chose m’a étonnée : pour évoquer les conditions de vie des habitants d’Oran enfermés dans la ville, et à certains moments priés de rester chez eux, jamais Camus n’utilise le mot de confinement, bien que ce mot soit ancien. Peut-être parce que nous l’avons tant utilisé…

 

Parmi mes lectures de ce trimestre, quelques-unes m’ont donné du plaisir à les lire :

Les vertus de l’échec, Charles Pépin

L’auteur, philosophe, nous fait toucher du doigt quelques réalités : d’un échec on peut apprendre ; si nous avons tant de mal avec l’échec en France, c’est parce que l’école humilie ceux qui en commettent ; il est peut-être l’unique moyen de vraiment apprendre et comprendre ; la peur de l’échec est ce qui nous empêche d’oser…

Et bien sûr j’oublie des éléments. Une lecture choisie en cette période de lancement de mon entreprise de médiation, pour le rassurer et me faire réfléchir, c’est réussi !

Huits crimes parfaits, Peter Swanson

Un roman à inscrire dans la catégorie lecture légère, mais tellement bien ficelé qu’il vaut le détour !

Un libraire est consulté par une agente du FBI car elle a relevé un schéma troublant dans des crimes commis récemment : ils semblent reproduire certains crimes décrits dans des polars issus d’une liste rédigée par le bouquiniste des années plus tôt. Et si le tueur cherchait à le faire passer pour l’assassin ?

Un polar avec des livres, un chat et une belle énigme, sans tomber dans les codes écumés de la plupart des thrillers actuels (sérial killers commettant des crimes toujours plus horribles, parce qu’il faut bien faire vendre), ce livre avait tout pour me plaire et ça a marché !

Il suffit de traverser la rue, Eric Faye

Surtout, si vous déprimez à cause de vos conditions de travail et de l’évolution toujours plus orientée vers le capitalisme financier de votre entreprise, ne lisez pas ce livre !

Chronique d’une agence de presse que la maison mère décide de rationaliser, en faisant des économies et en délocalisant des activités, ce roman vous fera sentir les poisons insidieux que l’économie instille dans les entreprises. Le narrateur, journaliste de 57 ans assez désabusé, en subira les effets et dresse une série de portraits occupant toutes la palettes des réactions humaines face à cette situation.

Il décidera de partir, et de se reconvertir. La jungle des organismes de formation qui prospèrent grâce à ces rationalisations d’entreprise en prendra pour son grade.

Toute ressemblance…

 

Allez, c’est l’été, on a le temps de lire et j’en profite à fond, fin septembre quand le troisième trimestre sera achevé, j’espère vous parler de beaux romans !

lundi 27 mars 2023

mes lectures du premier trimestre 2023


Déjà trois mois en 2023, il est temps de faire un point de mes lectures. Parenthèse : comme l’année passée j’ai eu du mal à tenir mon rythme mensuel, je me suis autorisée à passer à rythme trimestriel, fondant les plus grands espoirs sur cette décision. ET j’ai invité cette charmante lectrice, rencontrée en compagnie de @marsupilamima à Thuir, à accompagner ces publications.

J’ai donc lu une douzaine de livres, et parmi eux trois dont j’ai envie de vous parler.

Le royaume désuni, Jonathan Coe.

La presse en a beaucoup parlé, et à juste titre ! En voici la présentation sur le site de l’éditeur : https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Du-monde-entier/Le-royaume-desuni

En sept dates-clef, l’auteur brosse le portrait d’une famille et le portrait d’un pays. Si l’auteur nous a déjà habitués à parler de son pays à travers ses personnages, en particulier dans Le cœur de l’Angleterre, il se renouvelle aussi bien dans les thèmes que dans les personnages. Et son écriture est toujours aussi fine, nous donnant à ressentir le temps qui passe, qui change certaine personnes et pas d’autres, les contradictions que les événements extérieurs peuvent faire naître au sein d’une famille, la douloureuse question de la préservation de la mémoire des générations passées. Tout ceci avec au passage un portrait un peu acerbe mais très drôle du futur Prime Minister BoJo.

Le voyant d’Etampes, Abel Quentin

C’est un livre qui se trouve souvent sur les tables des libraires, de ceux qui vous font de l’œil. Vous hésitez, une fois, deux fois, puis finissez par l’acheter.

Quelle claque ! en voici la présentation sur le site de l’éditeur : https://www.editions-observatoire.com/content/Le_Voyant_d%E2%80%99%C3%89tampes

Un professeur d’université un peu raté, divorcé, au début de sa retraite, se lance dans l’écriture d’un essai sur un poète américain méconnu qui se tua au volant dans l’Essonne, au début des années 60, communiste, proche de Sartre  entre autres. Sauf qu’il ne parle d’un point qui lui parait un détail : ce poète est noir. Le voici la proie d’une cabale sur un supposé racisme qu’il ne ressent pas, lui qui a participé à la marche des Beurs en 1983, lui qui… Du haut de sa soixantaine, ne comprenant pas les mécanismes des réseaux sociaux, et coutumier de maladresses incroyable, il va s’enferrer dans cette situation… Heureusement, l’auteur met de la légèreté et de l’humour dans ce texte et évite que sa lecture ne plombe pas trop le lecteur.

Mais… si on n’est pas plombé, quand on est d’une génération proche du personnage on ne peut que s’interroger sur les écarts entre une génération qui s’est pensée généreuse, ouverte, humaniste, et une nouvelle génération qui crie aisément à la récupération identitaire, avec une légitimité à penser cela, et qui utilise des méthodes parfois choquantes.

Un portrait de notre époque, à lire !

La nature exposée, Erri de Luca

J’avais coincé sur Trois Chevaux, on m’a prêté ce court roman et j’ai hésité un moment… Puis je me suis lancée. en voici la présentation sur le site de l’éditeur : https://www.folio-lesite.fr/Catalogue/Folio/Folio/La-nature-exposee

Un montagnard, passeur de réfugiés, un peu sculpteur, se rend dans une petite ville de bord de mer ou on lui offre de restaurer une sculpture représentant le Christ, initialement totalement nu, et dont la « nature » a été masquée par un drapé. Il va s’investir profondément dans cet travail, cherchant à percer les secrets de cette œuvre par des lectures de journaux ou livres de l’époque et pas son contact physique étroit, percevant des détails via le toucher. Il fera aussi des rencontres, dont celle d’une femme qui veut tenter le « passage », ce qu’il va refuser longtemps avant de lui accorder, à ses risques et périls…

La nature ici n’est pas que le sexe du Christ, c’est aussi celle forte et sauvage qui nous entoure. Dans son rapport au religieux et au profane, quelle place aura la montagne, la forêt, la neige ? Et quelle place auront les croyances, les mythes, les légendes ?

Dans le récit, les descriptions de la montagne, je me suis demandée si De Luca n’a pas inspiré Paolo Cognetti, dont j’ai lu La Félicité du loup.

Le texte est court, assez ramassé, mais ce pouvoir de la nature est présent à chaque page. Ce roman est pour moi la porte ouverte à l’œuvre d’Erri de Luca, je crois que je ferai d’autres tentatives.

 

Sinon, j’ai bien aimé Aux animaux la guerre de Nicolas Mathieu et Les morues de Titiou Lecoq, et j’ai été déçue par Vivre vite de Brigitte Giraud, que je trouve auto-complaisant et pas très écrit.

La suite dans trois mois !