Oh là là comme je suis en retard ! Ceux qui me connaissent savent qu'il s'est passé plein de choses ces derniers mois et que je n'aurais pas eu trop le temps de vous faire part de mes mectures.
Me voici donc courant paèrs le temps, et tentant de le rattraper, on sait tous combien c'est difficile !
Mars a été prodigue en belles lectures, c'est donc un vrai plaisir que de les partager dans ce billet !
Trois filles d’Eve,
Elif Shafak
Un jour de 2016 à
Istanbul, Peri, femme bourgeoise, mariée et mère de trois enfants, se fait
voler son sac à main, contenant toutes sortes de choses et surtout une photo,
souvenir de ses années d’études, et bien plus que cela. Lors de la soirée qui
suit, un grand diner ennuyeux chez d’autres bourgeois, elle se remémore son
parcours. Elle a grandi dans une famille déchirée entre une mère à la pratique
religieuse très rigoureuse et un père plus libre penseur. Très bonne élève,
elle réussira à être admise à Oxford, ou elle vivra la question de la
différence, rencontrera 2 jeunes femmes musulmanes, ayant un rapport à Dieu
très personnel et s’inscrira dans un séminaire sur Dieu dirigé par un
professeur charismatique, et peut-être manipulateur.
Je suis partagée
entre agacement et émerveillement. Il me semble que l’autrice enfonce parfois
des portes ouvertes, voire utilise des poncifs sur le rapport des musulmans à
Dieu et sur l’impact des attentats de 2001. En même temps, le parcours de Peri,
fait de déchirements, d’interrogation sur ce que Dieu attend de nous, et
d’incompréhensions sur ce qu’elle est devenue, la rend attachante.
La construction en
allers et retours entre Oxford et Istanbul, entre le passé et aujourd’hui, est
bien maîtrisée.
Abuelo, Claude
Labbé
Un homme d’âge mûr
se remémore l’enfant qu’il a été, balloté par une famille en proie à des
difficultés (séparation des parents, père marqué par ses années de légion
étrangère). Confié à sa grand-mère, il arrive sur l’île de Bréhat et y
rencontrera un homme étrange, ancien général de l’armée républicaine espagnole,
considéré comme dangereux donc placé en résidence surveillée.
Une relation amicale
va naître entre l’homme et l’enfant, le guerrier voyant dans le petit une
résonance de ses enfants assassinés par les franquistes et l’enfant trouvant
dans sa présence une sorte de figure tutélaire.
J’ignorais tout de
Valentín Gonzáles, personnage visiblement haut en couleurs mais brutal https://fr.wikipedia.org/wiki/Valent%C3%ADn_Gonz%C3%A1lez.
Cette histoire improbable d’amitié entre un enfant des années 60 et un vieux
guerrier qui lui racontera des événements d’une grande violence, est attachante
car réellement racontée à hauteur d’enfant. Avec ce qu’il comprend des adultes,
ce qu’il ne comprend pas, et ce qu’il comprend à peu près.
L’unité de lieu
imposée par l’île de Bréhat rend l’histoire assez inéluctable : la chute
du père, les femmes qui prennent l’enfant sous leur aile, le départ de l’île.
C’est donc une
lecture qui m’a fait plaisir, même si certaines descriptions (quand c’est l’homme
de 50 ans qui est au centre de le scène) sont parfois un peu longues.
Les femmes de la
Principal, Lluís Llach
Saga sur 3
générations de femmes qui dirigent La Pincipal, domaine viticole catalan,
depuis 1893 ou le phylloxéra s’abat dessus jusqu’à nos jours. Des femmes de
tête, des femmes excentriques et manipulatrices, qui parviendront dans un monde
d’hommes à tirer leur épingle du jeu malgré toutes sortes d’embûches : le
manque d’éducation adapté au destin de Senyora pour la première ; un
meurtre terrible, prétexte à une belle enquête inspirée d’Agatha Christie pour
la seconde ; la révélation du passé de sa mère et sa grand-mère pour la
troisième. Cette histoire est bien sûr irriguée par les conséquences de la
guerre civile et l’instauration du régime franquiste, ou la police est exercée
par d’anciens militaires et ou le clergé est tout puissant.
C’est ma première
rencontre avec Lluis Llach écrivain, et je suis ravie ! Bien écrit, une
belle galerie de personnages, y compris les « seconds rôles », une
histoire tortueuse comme l’âme espagnole et comme l’histoire de ce pays entre
la fin du 19ème siècle et la fin du franquisme (et après…), je me
suis régalée de cette lecture.
Au risque de
divulgâcher des éléments, j’ai seulement été surprise que la dernière María, à propos de
l’homosexualité, utilise des mots comme « inverti » ou dérivation
sexuelle, bref des mots un peu stigmatisants, dans une conversation qui se
passe en 2001. Etrange compte tenu de l’orientation sexuelle de l’auteur !
Cinq
conversations avec la mort, autrement dit sur la vie, François Cheng
Pratiquant le qi-gong,
gymnastique traditionnelle chinoise, j’essaie de m’intéresser à ce qui le
fonde, et donc la tradition taoïste. La lecture du Tao Te King ne n’est pas
révélée suffisante pour que j’aborde cette formée de pensée, et François Cheng,
français né en Chine, plutôt philosophe, me semblait le bon passeur.
La lecture de ces
cinq méditations a été passionnante, à la fois grâce eu mode d’expression (cinq
fois, François Cheng nous accueille pour une méditation et nous parle) que
grâce à la démarche, ou l’auteur réussit de façon brillante à construire des
passerelles entre la pensée chinoise et la pensée occidentale, au lieu de se
contenter de les opposer.
Puisqu’il s’agit de
méditations, ou la pensée du lecteur a autant sa place que celle de celui qui
parle / écrit, je ne vais pas me lancer dans une « critique » ou
donner un avis. La seule chose importante, c’est que cette lecture a résonné en
moi et m’a permis de voir le monde un peu différemment. Point important :
le fais d’être athée n’est en rien un obstacle, puisque le Tao est un principe
à l’origine de toute chose, et pas un dieu 😉
« Oui, c’est
cela la vie : quelque chose qui advient et qui devient. (…) Sans devenir
il n’y aurait pas de vie ; la vie n’est vie qu’en devenant ». Le
prolongement de cette réflexion, c’est que sans la mort il n’y aurait pas de
vie. Si nous envisageons la vie à partir de l’autre côté qu’est la mort, ce que
nous faisons, nos actes, notre orientation, chaque moment de vie, est un élan
de vie
« Aussi,
d’après la tradition chinoise, tout être humain est constitué de trois
composantes : le jing, le « sperme », le qi, « le
souffle », et le shen, le « divin ». Sans qu’il y ait une exacte
équivalence terme à terme, on peut en gros rapprocher le jing du corps, le qi
de l’esprit et le shen de l’âme. » C’est ici que l’on voit se rencontrer
les visions taoïstes et occidentales.
« Parle-nous
Pour que plus rien
ne soit perdu,
Ni la foudre embrasant
les pins,
Ni l’argile chaude
aux grillons.
Ecoute-nous
Pour que nos voix à
la tienne mêlées
Jaillies de la
gloire d’un bref été,
Fondent enfin le
royaume. »
Dans ce beau poème,
peu importe que F. Cheng parle à Dieu ou au Tao, ça marche dans les deux
cas !
Rendez-vous avec
Rama, Arthur C Clarke
En 2130, un objet
inconnu et surprenant apparait dans notre système solaire. C’est un immense
cylindre métallique, baptisé par mes humains Rama. A cette époque, les humains
ont en partie quitté la terre et conquis des planètes plus ou moins
accueillantes ou ils se sont établis. Ils demandent au vaisseau spatial le plus
proche de Rama de l’explorer. Après un atterrissage réussi, ils s’introduisent
aisément dans Rama et découvrent un monde de structures, d’escaliers, de
routes, d’artefacts témoins d’une technologie élevée… sans trace de vie. Que
réservera l’exploration approfondie de Rama ?
Un roman de
science-fiction d’une grande originalité… Le premier contact avec une
civilisation extra-terrestre n’en est pas un ; il se déroule à bord d’un
objet spatial qui semble être un monde à lui-seul… Un monde de silence, un roman tout en
lenteur, sans esbroufe, sans recherche d’effets spectaculaires inutiles, sans
surenchère inopportune. Et cela donne un ouvrage qui vois tient en
haleine ; vous êtes envahi par cette envie continuelle de connaître la
suite, la solution de l’énigme qu’est Rama
J’ai lu ce livre
parce que Denis Villeneuve a annoncé qu’après Dune (excellente adaptation), il
envisageait d’adapter ce roman dont je n’avais jamais entendu parler, et je
suis ravie de cette rencontre avec Arthur C Clarke