jeudi 6 mars 2014

Cher Roger



Un hommage à un Roger a déjà été publié sur ce blog, par un blogueur qui évoquait son frère disparu. J'ai souvent songé à écrire celui-ci , une hommage à "mon" Roger disparu, sans oser me lancer. J'ai enfin franchi le pas il y a quelques jours, pour réaliser que... il était temps, le trentième anniversaire de sa disparition est dans quelques jours.

Cher Roger

Moi, je ne suis pas du genre à honorer les morts: je veux dire aller sur leur tombe, mettre des fleurs, tout ça... mais je suis du genre à penser à eux. A ceux que je regrette, et parfois aux autres, car on ne peut pas vouloir que du mal aux gens.

Mais il y a quelques disparus très présents à ma mémoire. Mon grand-oncle, un peu plus que mon grand-père car il a été là plus longtemps, il m'a donc plus influencée. Mon grand-père bien sûr. Et puis vous. Comment dire... je me sens orpheline depuis que vous nous avez quitté.

Le rugby, enfin les commentaires de rugby, n'ont plus jamais eu la même saveur après.

De vous il me reste une voix, un accent, un enthousiasme, et surtout une vision du jeu. J'avais un jour noté une petite phrase dans un carnet. A propos d'une passe d'un joueur qui a envoyé son partenaire à l'essai, vous vous êtes exclamé "c'est tout le rugby, ça: on ne ait pas une passe, on offre un essai!". Le petit carnet, je ne l'ai plus depuis longtemps. Mais c'est drôle, je n'en n'ai pas besoin pour me souvenir de cette phrase.

Aujourd'hui, les commentateurs nous disent "magnifique essai de untel, son nième en championnat, etc..." et oublient l'auteur de la passe, souvent bien plus remarquable geste que l'essai.

De vous il me reste la photo de Rives vous offrant son maillot, Je ne l'ai jamais cherchée sur Internet. Pas besoin, elle est gravée dans ma mémoire.

De vous il me reste aussi de beaux souvenirs de votre comparse Bala et de son maniement si élégant de la langue française. En terminale, ma prof de français nous confiant un jour, toute rougissante, aimer écouter les matches de rugby, pour la beauté de son verbe.

De vous il me reste surtout cette vision du jeu, au sens premier du mot: on est sur le terrain pour jouer, même si jouer se conjugue avec combattre, affronter, conquérir. Jouer se conjuguait toujours avec fierté d'être là, de porter le maillot, de servir son équipe.

C'est cela que j'ai appris à aimer, et que je continue à aimer envers et contre tout, malgré les changements intervenus.

Alors voilà: moi qui n'aime pas (trop) honorer les morts, j'ai tout de même voulu vous rendre hommage. Aucun hommage ne vaudra les larmes de Jean-Pierre Rives, lors d'une émission anniversaire de Stade 2, évoquant votre souvenir. Ce jour-là, j'ai pleuré avec lui.

Vous me manquez depuis trente ans, et ce n'est pas près de s'arrêter.

Valérie

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