vendredi 24 octobre 2025

Blois hors du temps, pressé par le temps, de son temps

 

Vous voulez vous sortir hors du temps, être pressé par le temps et dans votre temps en même temps ?

Venez au festival des Rendez-vous de l’Histoire de Blois ! Il va vous falloir attendre jusqu’en octobre 2026, mais en attendant je vous explique ces apparentes contradictions.

 Quand vous êtes à Blois pour ce festival, vous êtes hors du temps. Une conférence, une table ronde commence et vous voilà plongé dans une autre époque, concentrés sur les interventions d’experts passionnants. Des moments suspendus, les historiens savent susciter questionnements et réflexion, sur l’histoire en elle-même et sur ses résonnances dans le temps présent.

 Ainsi, lors de la session 2025, une conférence de la journée d’études « Être français, un statut, des statuts ? » nous a fait réfléchir sur la notion de nationalité, au fond pas si ancienne que cela, puisque sous l’ancien régime, être français signifiait être sujet du roi, ce qui pouvait être le cas de personnes nées dans l’autres territoires ; et que sous la révolution, c’est la citoyenneté qui primait, donc le fait d’être investi dans la cité. Nous avons alors voyagé de Louis XIV au début du XXe siècle, pendant une heure et demie ou le temps cesse de s’écouler.

 Cette manifestation foisonne pendant 4 jours : tous les lieux de la ville accueillent des exposés, des cartes blanches, des cafés littéraires, et tant d’autres animations. La halle aux grains, cœur battant de ces rendez-vous, la mairie, la CCI, le tribunal, l’université, le château, la maison de la magie, des établissements de l’enseignement supérieur… Les habitués arrivent dans la ville avec un programme préparé à l’avance, en visant des événements compatibles en termes de lieux et d’intervalles de temps. Faute de quoi il est possible de se retrouver à courir après le temps, ou plus précisément après l’horloge, tel le lapin d’Alice, en pensant « je suis en retard, en retard, en retard ! »

 Cette année, après une dizaine d’années d’expérience, nous avons même délaissé une conférence dont le sujet nous passionnait pour avoir le temps de nous asseoir le midi, de manger sans avaler en vitesse, de respirer. Comme dit le proverbe, choisir c’est renoncer. Une année, nous avons tenu à assister à 4 interventions en un jour, nous avons fini épuisés et pas retenu grand-chose de la dernière. Il vaut mieux profiter pleinement de peu que vouloir trop en faire.

 Au salon du livre qui accompagne et rythme le festival, les auteurs présents ont généralement une heure pour leurs séances de dédicaces, et les lecteurs avides se précipitent pour être surs d’obtenir une signature. Là encore, le temps les presse admirateurs et auteurs, mais de beaux instants d’échange se produisent. J’ai en mémoire une jolie rencontre personnelle avec François Garde pour Marcher à Kerguelen, et cette fois-ci un échange sincère avec Stéphane Michonneau pour Franco, le temps et la légende.

 Enfin, ce festival est pleinement de son temps.

 D’abord, les professeurs d’histoire constituent le public principal, avec de nombreux ateliers pédagogiques ou est interrogée la façon d’enseigner cette matière de nos jours.

 Ensuite, les thèmes interrogent le plus souvent de grands sujets de débats d’aujourd’hui. Voici quelques exemples :

§  Cette année, « La France ? » permettait de d’évoquer ce qu’est être français, ce qu’est la France en elle-même, et l’utilisation au cours des siècles du roman national.

§  L’année prochaine, Blois évoquera « Les marchands » dans un monde qui a vécu la mondialisation et vit un retour de bâton avec la guerre des taxes à l’importation.

§  En 2024, le festival se penchait sur la ville, notant que les villes abritent aujourd’hui la moitié de la population humaine et doivent relever de nombreux défis, notamment face au changement climatique, mais pas seulement. Dès lors, comment adapter la ville aux enjeux de demain ?

Je ne lasse pas de ces apparentes contradictions du rapport au temps de ces Rendez-Vous. Bien décidée à participer encore et encore, pour tout ce que j’apprends, pour l’éclairage que cela apporte sur notre époque, et peut-être parce que l’histoire est la discipline qui, bien enseignée, est la plus à même de former les citoyens de demain.

Alors, on s'y retrouve en octobre 2026  ? 

dimanche 10 août 2025

Extrait #10 : des livres et du classement

 Le cœur de l’été et ses lectures m’offrent l’opportunité d’évoquer le classement des livres. C’est un sujet dont il a déjà été question ici, ou @marsupilamima a évoqué sa pathologie des livres, et

Quelle surprise qu’un roman aborde ce sujet, et en plus d’une façon… originale !

 

Un roman qui se passe en montagne lu... en montagne ! 

 Plantons le décor : une frontière entre deux pays ennemis, sur l’Altiplano dans la Cordillère, à 5000 m d’altitude. Deux postes-frontières se font face, au-dessus de toutes les villes, de toute vie ou presque, dans un désert de roches et entourés de volcans.

 Dans l’un des postes-frontières, le lieutenant Costa peine à maintenir ordre et discipline. Dans l’autre, le chef, un sergent, est remplacé par une femme, une capitaine. Et tout un équilibre incertain vacille alors.

 Le lieutenant Costa fait passer le temps en lisant. Mais tout comme ses subordonnés, ses livres semblent prendre des libertés.

Extrait.

En jetant un œil aux livres empilés sur son bureau, il se dit qu’il devrait mettre de l’ordre, mais il différait cette besogne depuis des années. Ces volumes reliés de tous genres et tailles ne se laissaient pas aisément ranger, c’était comme s’ils cherchaient eux-mêmes une place et se posaient ici et là selon leur caprice, mais ceux qui s’aventuraient hors de la chambre finissaient dans le feu ou entassés dans une remise par des mains invisibles, qui ne pouvaient être que celles de Quipildor[1].

 Et chez vous, les livres choisissent-ils leur place à leur convenance ?

Extrait de Roca Pelada de Eduardo Fernando Varela, traduction François Gaudry

 [1]Sergent ayant le rôle d’adjoint du Lieutenant Costa

samedi 5 juillet 2025

des livres et du crochet

 

Depuis que je note tous les livres lus chaque année, donc depuis 2014, je lis en général entre 35 et 40 livres par an.

A la fin juin de cette année, j’en ai lu 12, ce qui fait un potentiel de… seulement 24 cette année.

Usuellement, c’est à ce stade du raisonnement que d’aucuns pourraient argumenter, se justifier :

  •       Ouiiiiii mais j’ai affronté des pavés, ce qui est vrai : Le Tout de Dave Eggers et La mort immortelle de Liu Cixin ne se lisent pas en 5 mn.
  • Alors tu comprends, j’ai été très fatiguée, je ne lisais pas beaucoup car je n’en avais pas la force, ce qui m’est arrivé en mai et juin.
  • J’ai été très occupée, beaucoup de travail, des activités de toutes sortes et finalement, c’est mon temps de lecture qui en a pâti (vrai aussi).

D’autres pourraient mettre en avant que, au fond, quelle importance tout ça ? Ce qui compte c’est le plaisir de la lecture, qu’explorer des romans ou des essais, ce n’est pas une compétition, et que la performance n’est pas un sujet.

Et tous ces raisonneurs auraient raison. Alors pourquoi je vous en parle ? A cause de mon projet de plaid aux couleurs des couvertures des livres lus !

Petit rappel pour ceux qui ne sont pas au courant.

En début d’année, je suis tombée sur une publication Facebook qui m’a attirée : deux femmes ont réalisé des carrés au crochet de la couleur de la couverture de chaque livre qu’elles avaient lu, puis les ont assemblés en un plaid. Incroyable ! Un projet qui combine mes deux hobbies ! Alors je me suis lancée.

Et ça donne des réalisations de ce type :

 


Puis je me suis rendu compte qu’assembler ces carrés donnerait un résultat peu esthétique, alors j’ai décidé d’ajouter un dernier tour de la même couleur pour tous les carrés, comme ceci :

 


Enfin j’ai mesuré les carrés. Ils font environ 13 cm de large. Pour un plaid d’une dimension agréable, dans lequel on puisse se lover (un peu) il faudrait a minima 81 carrés, composant un carré de 9 * 9. Les bons en maths, ne me dites pas que ça fait un peu juste comme plaid, je le sais. Lisez plutôt la suite.

Parce que c’est là que mon rythme de lecture réduite est un problème. A 24 livres par an, il faudra presque 3 ans et demi pour avoir lu assez de livres et crocheté tous les carrés. A 40 livres par an, mon rythme moyen depuis plusieurs années, à peine plus de deux ans seraient nécessaires.

Alors, dois-je me ressaisir et me plonger un peu plus dans les livres, ou laisser faire ? Je suis partagée entre mon envie que ce projet au crochet avance, ne dure pas une éternité, et mon envie de ne pas me brusquer. Deux envies clairement contradictoires. Pas tout à fait un choix cornélien, mais presque.

Avez-vous deviné la suite ? je vous la livre : je procrastine. Je repousse la décision et je laisse faire. Et ce n’est peut-être pas grave. Si vous voulez, je vous tiendrai au courant 😉si je passe au braquet supérieur, ça vous dit ?