jeudi 6 février 2014

Petits Bonheurs de lecture #8

De Saint-Ex, je n'avais lu que Le petit prince. Pas vraiment aimé: trop mièvre à mon goût. Mais j'ai décidé de me lancer à nouveau, avec Vol de Nuit. Je suis émerveillée, une écriture magistrale !

Un point a attiré mon attention, dans la première partie : son exceptionnelle description de la nature. Et j'en veux pour preuve ces deux extraits sélectionnés pour vous.




(un aviateur en vol contemple des villes au sol)

Il eût pu croire, dans ce calme, faire une lente promenade, presque comme un berger. Les bergers de Patagonie vont, sans se presser, d'un troupeau à l'autre : il allait d'une ville à l'autre, il était le berger des petites villes.Toutes les deux heures, il en rencontrait qui venaient boire au bord des fleuves ou qui broutaient leur plaine.

(l'aviateur rencontre une tempête)

D'un pic, à lavant, jaillit la neige : un volcan de neige. Puis d'un second pic, un peu à droite. Et tous les pics, ainsi, l'un après l'autre, s'enflammèrent, comme successivement touchés par quelque invisible coureur. C'est alors qu'avec les premiers remous de l'air les montagnes autour du pilote oscillèrent.

mercredi 15 janvier 2014

A l'Encre Bleu Nuit fête son anniversaire



Mon Dieu ! A l’Encre Bleu Nuit a déjà deux ans ! Comme le temps passe…

J’ai relu ce soir (du jour où j’écris, bien malin qui saurais deviner quel jour) le tout premier billet. Une sorte de bouteille à la mer, envoyée à mon usage uniquement, à relire ici. Étonnant a postériori.


Il faut bien l’avouer, je ne savais pas bien ce que j’allais faire de ce blog. Et puis, petit à petit, une ligne s’est construite, malgré  une grande diversité de billets.

En tant qu’ingénieur, et bien que j’ai horreur de ça, je me dois de vous entretenir de quelques statistiques.

A l’Encre Bleu Nuit, c’est 112 billets publiés en deux ans, et 14851 pages vues, ce qui fait près de 133 lectures par billet en moyenne. Mais une moyenne, ça peut cacher d’étonnantes disparités… Ainsi, l’article le plus lu, c’est « chêne adolescent #4 », 309 lectures, et celui qui a eu le moins de succès, c’est « chêne adolescent #2 », seulement16 lectures. Cela me plonge dans des abîmes de perplexité. En effet cette série a eux 7 épisodes. Certains lecteurs se sont donc arrêtés au 4, et  n’ont pas lu la suite ? D'autres ont lu l'épisode 4 sans lire les précédents ? Assez loufoque... Et ce constat ravive une petite tristesse : cette nouvelle communautaire n’a pas eu de fin, faute d’un repreneur pour écrire l’épisode 8… Voir le billet « il faut sauver le chêne adolescent », appel lancé sur les réseaux, lu 99 fois, mais qui n’a pas trouvé d’écho…

Au palmarès des billets très lus, on trouve « Sant Jordi », 176 lectures. Là, c’est un peu normal, je l’ai rediffusé sur les réseaux en 2013, puisque la Saint Georges revient chaque année… Et il est probable que vous y ayez droit cette année ! Il faut dire que j'aime bien cette tradition.

Un autre sujet d’étonnement concerne l’article « d’un monde à l’autre », vu 148 fois. Cela n’a pas déclenché beaucoup d’achats du livre, je ne dois pas être douée en pub. Pourtant tous ceux qui ont lu le livre l’ont aimé, laissez-vous tenter !

A l’Encre Bleu Nuit, c’est aussi six nouvelles publiées :
« Étrange Absence », inspiré par une statue de Maillol
« Le livre du futur », texte préparé pour un vases communicants qui n’a pas eu lieu
« manipulés », publiée en 6 épisodes
« prédestination », publiée en 4 épisodes,
« des bandits en culottes courtes », publiée en 6 épisodes
« graines en sommeil », nouvelle proposée à un concours mais pas primée.

J’ai eu le grand plaisir d’accueillir plusieurs contributeurs :
Mon ami Alain pour un poème sur l'ivresse de lire
Mon père pour deux textes, « des racines et des ailes » et « la vie et rien d ‘autre »
Ma mère, pour un abécédaire
Mon ami Jean-Claude Duponq, pour « passages » et pour un vases communicants
Une lectrice du canal, Martine Silber, et sa pathologie dela lecture
Wana Toctouillou pour un hommage à un disparu, A Roger, en seconde place au palmarès des lectures
Myriam Oh, pour un échange de lettres. Elle « partir », Moi « revenir ».

A l’Encre Bleu Nuit, c’est aussi deux rubriques récurrentes selon une confondante irrégularité. Mes « extraits » vous livrent quelques lignes lues généralement dans un roman, ou un auteur parle de l’acte d’écrire. Mes « petits bonheurs de lectures » vous font partager quelques émerveillements littéraires. J’ai une tendresse particulière pour celui-ci, qui m’a valu un merci de l’auteur, et pour celui-là, qui m’a valu de chaleureux commentaires.

Enfin, A l’Encre Bleu Nuit, c’est aussi des projets. Un compte-rendu de la soirée Paroles d’Encre à Versailles, ou nous avons rencontré Sorj Chalandon. Une réponse à Umberto Eco et Jean-Claude Carrière, dont je n’ai pas aimé les entretiens dans « n’espérez pas vous débarrasser des livres », malgré la beauté du titre. Peut-être d’autres nouvelles, qui sait ? Les émotions des lecteurs du canal à la lecture de Balzac.

Pour finir, quelques impressions. Je suis fière de mon blog et je m’amuse bien à écrire dedans. Mais quel stress aussi ! Sans arrêt je suis à l’affut de nouvelles idées, de sujets, de rencontres fortuites… Pas facile de continuer à vous proposer régulièrement (quoi que) des lectures. Un blog, c’est aussi une sorte de fil à la patte. On se confronte sans arrêt au risque de tomber dans l’obligation d’écrire pour continuer à le faire vivre. Pourtant, en la matière, la contrainte est mauvaise conseillère. Il faut savoir se donner la liberté de ne pas, comme Bartleby, mais sans semer autant de trouble autour de soi !

A l’Encre Bleu Nuit va donc continuer son bonhomme de chemin, tranquillement, à son rythme. A bientôt !

lundi 13 janvier 2014

Petits bonheurs de lecture #7 : Balzac



Mes amis les #lecteursducanal m’ont entrainée à lire du Balzac. Un billet parlera peut-être de cette expérience collective.

J’ai choisi le Père Goriot, et j’ai rencontré quelques difficultés à le lire : si l’histoire est forte et les personnages intéressants, la narration étirée parfois à l’infini m’a posé problème.

De plus, j’ai été surprise par les contrastes étonnants entre un usage de la langue d’une grande subtilité, et quelques phrases d’une lourdeur incroyable.



Dans la première catégorie :

« Les hommes portaient des redingotes dont la couleur était devenue problématique, … »

« … ; il la questionna sur les liens de parenté qui pouvaient encore se renouer. Après avoir secoué les branches de l’arbre généalogique, la vieille dame estima que, de toutes les personnes qui pouvaient servir son neveu parmi la gent égoïste des parents riches, madame de Beauséant serait la moins récalcitrante ».

Et dans la deuxième :

« Le Père Goriot regarda tristement son ouvrage d’un air triste … »

« ( …), de qui elle attendait impatiemment un coup d’œil, croyant cacher son impatience. »

Il est peu de dire que j’ai été surprise de telles maladresses !Alors, Balzac est-il un petit bonheur de lecture ? J'hésite encore, peut-être devrais-je lire un ou deux autres de ses romans avant de me prononcer...

jeudi 9 janvier 2014

Graines en sommeil

La nouvelle que vous allez lire a été présentée au concours "envie de vous lire" organisé à Viroflay (92). Elle n'a pas été primée, à mon grand regret. L'association organisatrice envoie aux participants un petit fascicule avec les nouvelles primées. Une personne membre du jury a ajouté à la main sur la lettre qui accompagnait le fascicule le petit mot suivant: 
merci pour "Graines en sommeil" qui est une belle reconnaissance de travail d'instit, et qui nous a touchés
Cette annotation fut une belle récompense ! Le thème était: "Récolte tardive". Place au texte: 



Graines en sommeil

Deux hommes sont assis sur un banc, le soir. Ils discutent. Un réverbère leur offre sa pâle lumière et leur permet de voir le visage de l’autre. Le plus âgé, justement, observe attentivement son interlocuteur, qui parle les yeux dans le vague.
- Un jour, vous avez amené des disques à l’école, vous vous souvenez ? Du rap, des chants baroques, de l’opérette, vous nous avez demandé de nous concentrer sur les voix. C’était génial, cette façon d’écouter ! La deuxième fois que vous passiez les morceaux, j’entendais de nouvelles choses.
- Tu sais, Nathan, je faisais cela chaque année. Il est toujours difficile pour un instituteur de mesurer si ce genre d’activité a une résonance chez ses élèves.
- Et ben, chez moi ça a résonné, ça oui ! Mais seulement il y a quelques mois… Pas à l’époque.
Un silence. Le jeune homme reprend sa respiration.
- Un jour vous avez dit un truc étrange à des parents. Je passais à côté, j’ai tout entendu. Vous disiez « je me vois un peu comme un semeur. En début d’année je dépose des graines dans les cerveaux des enfants, et en juin je récolte ».
- Tu as entendu cela ? Oui, je l’ai toujours pensé. Un instituteur est un semeur. Sa vendange est formée de tous les progrès, les découvertes de ses élèves, de la maturité qu’ils ont acquise aussi. Quand j’étais enfant, on me disait « prends-en de la graine ! », j’en ai pris et j’en ai donné.
A son tour de laisser passer un silence.
- Mais dans mon souvenir, tu étais plutôt rétif, une terre aride où peu de graines germaient.
Nathan eut un rire.
- C’est vrai que j’étais un sacré boulet.
- Alors raconte. Comment en es-tu  arrivé à chanter comme un ange ? Un ange à la voix grave, mais si pure ! Ce soir, tes quelques solos étaient de vraies merveilles.

Quand j’ai quitté le collège, je ne savais pas quoi faire de mes dix doigts. Envie de rien. Motivé par rien. Je vais vous épargner le couplet sur le père chômeur et démissionnaire, la société, tout ça. Ca existe bien sûr, c’est un peu là – il se frappe la poitrine – mais la vérité c’est que j’étais vide. Des gens comme vous avaient essayé de me remplir, enfin pas moi personnellement, je devrais dire de nous remplir. La classe. Des profs. Vous, vous regardiez tous les gosses pareil. Mais je n’étais pas comme eux. Il y avait ceux qui faisaient du cheval, de la natation, de la guitare. Ceux qui allaient au cinéma. Ceux qui jouaient au foot avec les autres. Je n’avais aucune passion, aucun hobby. De temps en temps, pour faire plaisir aux potes, je tapais dans le ballon, ou je regardais un film chez l’un d’entre eux. Cela ne me donnait pas de joie particulière. La seule douceur dans cette vie morose, c’était quand un prof me parlait, à moi. « Alors Nathan, que pensez-vous de.. ? ». Je tentais de répondre, maladroitement. Puis le prof passait à un autre, et je retournais à ma mélancolie.

N’ayant envie de rien, bien sûr j’étais incapable de choisir un métier. Mon père a décidé pour moi. Pas de diplômes, alors ce fut livreur de pizza, garçons de courses. Ça ou autre chose… Aucun intérêt, sinon de gagner un peu de pognon et d’aider mes parents.

Un jour je vous ai aperçu dans la rue. Vous sortiez d’une librairie, les bras chargés. Vous parliez avec une jeune femme, votre fille peut-être ? Et votre histoire de semeur m’est revenue brutalement en mémoire. Et alors… j’ai commencé à sentir une vraie graine dans mon cerveau. J’ai regardé sur Internet à quoi ça ressemble. Il y en a des tas de sortes ! Avec des formes bizarres parfois. Et puis j’ai vu, sur un site, des photos qui se suivaient et  qui montraient une graine d’érable en train de germer, jusqu’à la formation de la première feuille. Le lendemain matin je me suis réveillé avec un mal de crâne… pire que si j’avais bu ! C’est dire ! Il y avait un truc dans mon cerveau… Un truc qui venait d’apparaître. Les jours d’après ça a grandi, grandi… J’ai vite compris qu’un arbre était en train de pousser dans ma pauvre tête. Les migraines ne me quittaient pas, je devenais fou. Parfois j’avais envie de me taper la tête contre les murs, espérant tuer ce qui envahissait mon caillou, incapable de penser. Je vous en voulais, j’avais une envie terrible de vous cracher à la gueule. Et comme par hasard, je ne vous croisais jamais. J’ai même planqué devant la libraire, c’est vous dire !

Le temps a passé, petit à petit j’ai arrêté de vous traquer. Mais je n’en pouvais plus des migraines. Et puis un jour… Mon crâne a fait comme un œuf : sous la pression des petites branches, il s’est fendillé, ouvert. Et l’arbre a pu se déployer. C’était un érable, comme dans mon rêve. Tout cela se passait étrangement dans une grande douceur. En pleine lumière. J’entendais de la musique, venue de nulle part. De vieilles chansons et de l’opérette je crois. J’ai reconnu un  air que vous nous aviez fait écouter, La Belle Hélène. Plus tard j’ai trouvé que c’était d’Offenbach. Je me suis concentré sur la voix, comme vous nous disiez.
Bon, je vous la fais courte : je n’ai aucun bandage à la tête, rien ne s’est passé, c’était une sorte de rêve, mais éveillé. Et après, plus de douleurs au bulbe ! Mais des mélodies qui trottaient dans mon cerveau…
(Nathan se tait. Il sourit.)
C’est drôle, je ne les connaissais pas ces chansons. Et cela n’a pas empêché que je me mette à les fredonner. C’est comme ça que je me suis inscrit à ce cours de chant. Vous me direz que du gospel, vous ne nous en aviez pas fait écouter, mais c’est ça qui m’a tenté. Et ça m’a amené au concert de ce soir, dans l’église. Voilà.

- Et bien ça alors ! Je n’en reviens pas… cette histoire de graines…
Un temps. Il observe le profil du jeune homme.
- Tu sais, j’ai adoré ta voix, et surtout ta façon de chanter. Tu y mets les sentiments, tu les ressens, alors ton chant est dense. Ça sent vraiment dans tes solos. Tu chantes depuis combien de temps ?
- Quatre mois.
- Tu es vraiment incroyable ! Tu vas continuer ?
- Le chant ? Bien sûr ! Mais pour le reste je ne sais pas. J’en ai marre d’être juste un livreur de pizzas. J’ai envie de créer ma boîte, une société de livraisons de petits objets. Dans une grande ville, des tas de gens ont besoin qu’on leur transporte des choses. J’ai vu un gars d’une assoc’ de quartier qui aide les jeunes pour ce genre de projet. J’aimerais bien que ce soit une boîte un peu plus juste que celle ou je suis, plus honnête avec les livreurs. Moi, je trouve qu’on m’exploite.
L’instituteur se lève, et tend la main à son ancien élève.
- Ne lâche rien, Nathan. Ni le chant, ni la boîte. Et si je peux faire quelque chose pour toi…
- Oh non M’sieur ! Vous avez déjà fait tellement !

En s’éloignant dans la rue sombre, l’instituteur remercie la pénombre qui lui permet de masquer ses yeux embrumés de larmes. Des moissons, il en avait beaucoup eu, sa carrière avait été fertile. Il pensait être un bon semeur. Parfois ces récoltes furent tardives… Mais une graine qui mettait quinze ans à germer, pour devenir un véritable érable et révéler une vocation, ce n’était jamais arrivé. Une sorte de point d’orgue de ses moissons. Impossible de faire mieux, n’est-ce pas ?
Après tout… bien d’autres graines semées par ses soins étaient endormies dans des cerveaux encore infertiles. D’autres germinations pouvaient se produire, d’autres récoltes inespérées… Il avançait en âge et pensait parfois à prendre sa retraite. Une grande lassitude et l’envie de passer la main avaient envahit ses journées depuis quelques années. Mais la découverte de ce soir le prenait au dépourvu. Et si un marronnier, un chêne ou un merisier naissait dans un autre crâne ? Oh ! Devait-il continuer à semer ?

lundi 16 décembre 2013

la randonneuse et les balises #5



J’ai une tendresse particulière pour les cairns, ces tas de cailloux qui balisent certains sentiers, remplaçant avantageusement des traits de peinture. Pour un tas de raisons.

D’abord, parce qu’ils me rappellent les livres de Frison-Roche qui se déroulent au Sahara, à travers lesquels je les ai découverts. Mais pas du tout me diront les  spécialistes, dans ces livres-là l’auteur parlent de redjem, pas de cairns. Et bien j’insiste. Quand l’ai lu La montagne aux écritures, je ne savais pas ce qu’était un redjem.  J’ai demandé à mon père qui a eu cette réponse lumineuse : « c’est un cairn ». Et bien je vous l’avoue, je ne me suis pas sentie éclairée.  Je ne savais pas ce qu’était un cairn. Bon…

Ensuite, le cairn est pour moi une image de la solidarité. La coutume veut, en passant, d’ajouter une pierre sur le petit tas qui se présente à vous, transformant ainsi un monticule en véritable sémaphore !

Un bel exemple de cairn résultant de la solidarité d’un groupe, mais aussi de son orgueil, est celui bâti par un village gallois dans le film l’anglais qui gravit une colline et descendit une montagne. Des villageois, vexés qu’on qualifie le relief au nom imprononçable jouxtant leur village de colline au prétexte qu’il lui manque 100 ou 200 m de haut, bâtissent en son sommet un gigantesque cairn qui permettra qu’on la requalifie en montagne…

Une petite recherche m’a fait découvrir que le cairn date du fond des âges, du néolithique, ou des tas de pierres recouvrant des sépultures étaient appelées de ce nom, comme le cairn de Barnenez. Cela  ne rend les cairns que plus sympathiques !

Les cairns ne sont souvent pas que de simples tas de pierres, ils donnent l’occasion à la créativité des marcheurs de s’exprimer. 

Ainsi ce monticule orné de branches en Corse :

Ce cairn un peu équilibriste au Puigmal d’Err : 


Cette véritable œuvre d’art toujours en Corse : 


Alors quand des cairns sont abattus par des randonneurs indélicats, je suis comme Idéfix devant un arbre tombé : je pleure. Entre le lac des Bouillouses et l’étang Bleu, les cairns avaient subis de graves dommages. J’en ai réparé plus d’un, au grand dam de mon compagnon un peu agacé de s’arrêter aussi souvent ! 







Je fais finir sur une note triste, vous présentant un cairn émouvant rencontré sur le flan du Cambre d’Aze : 

 Comment ne pas voir là l’hommage de proches d’un disparu à son amour de la montagne ?

Ici s’achève cette série de billets sur mes aventures avec les balises de randonnée. Si j’ai pu vous donner envie de chausser vos meilleures chaussures et d’aller mettre un pied devant l’autre au long des chemins et sentiers, j’en suis heureuse.





lundi 9 décembre 2013

la randonneuse et les balises #4


Coucou ! Me revoici le long des sentiers, carte à la main bien sûr, en train de chercher les marques qui me mèneront au bout de ma randonnée !

Mais les balises peuvent être facétieuses, trop belles pour être vraies, redondantes, effrayantes…

Si vous marchez en Auvergne, entre le Puy gros et la Banne d’Ordanche, vous pouvez tomber comme ce fut notre cas sur ces indications : 



Là c’est carrément la panique ! Parce que vous n’avez aucune intention d’aller à Rome ; parce que vous ne savez plus quelle direction prendre. Bien sûr un bon vieux proverbe vous vient à l’esprit, mais le risque d’un looooong détour pour arriver au sommet  de la Banne d’Ordanche, avec les kilomètres qu’on sent déjà dans les pieds, vous enthousiasme peu… Et puis tous les chemins mènent-ils à ce volcan ? Si ça marche avec Rome, concernant la banne d’Ordanche rien n’est moins sûr ! Et bien rebelote, comme dans un épisode précédent, on analyse la carte (IGN) et on trouve… à gauche !

J’ai déjà évoqué les cairns, et j’ai  l’intention d’y revenir, dans un billet qui leur sera spécialement consacré. Mais j’ai rencontré un jour une balise sur un cairn :

Cette redondance m’inquiète : prendrait-on les randonneurs pour des assistés, incapable de suivre des cairns sur une portion de sentier ? A moins que le monde moderne n’ait encore frappé : le baliseur a posé son trait jaune pour éviter le procès intenté par un marcheur vraiment mauvais qui se serait perdu ?

La balise, c’est d’abord un trait de peinture sur un arbre, une pierre, un mur… J’avoue ne pas aimer en rencontrer de trop belles, trop explicites, pas assez sauvage. Comme à l’entrée de la vallée de Chaudefour :


La civilisation devient alors trop présente.

Dans le Lot, aux environ de Rocamadour, émergeant d’un brouillard léger, nous sommes tombés sur une balise qui nous a beaucoup alarmés : 


Qu’a-t-il bien pu se passer ? Le baliseur a-t-il égorgé un loup et laissé là le sang de l’animal ? Ou bien lui-même se vidait-il de son sang après avoir été agressé par un ours ? Un marcheur perdu dans le brouillard, après des heures d’errance, a peut-être laissé là une dernière parque de son passage ?

D’autres marques dégoulinantes du même genre ont augmenté notre angoisse : et si un sérial killer sévissait là ? Risquions-nous de nous trouver nez à nez avec le Tueur du Sentier de l’Alzou ?

Vous vous doutez que si je vous le raconte aujourd’hui, c’est bien que la rencontre n’eut pas lieu. Mais j’en tremble encore…

Enfin, je ne résiste pas au plaisir de vous dévoiler la plus alléchante balise jamais rencontrée, au sortir des gorges de Carança: 


Bon, le truc qu'elle ne dit pas, cette balise affriolante, c'est le dénivelé qui reste à faire, et surtout la pente bien raide ! C'est vrai qu'une fois vaincue (et oui, c'est comme les côtes, en montagne les descentes aussi sont à vaincre) on est ravis de trouver ce bar...



lundi 2 décembre 2013

la randonneuse et les balises #3


Une balise de randonnée, ça sert à trouver son chemin. Alors, pour remplir son rôle, elle doit être claire, explicite, au bon endroit. Sinon, le pire est à craindre… Savez-vous qu’il n’y a pas plus agacé qu’un randonneur qui erre depuis des heures dans une forêt (j’aime bien la forêt dans cette anecdote : difficile d’y avoir des repères visuels quand on ne la connait pas…) à la recherche de la balise salvatrice ? On en a vu capables de mordre dans cette situation pour le moins… inconfortable.

Voici donc quelques situations vécues qui auraient pu tourner au carnage…

Le bûcheron morvandiau qui a coupé ce chêne, découpé les tronçons portant les célèbres bandes rouge et blanc, et les a placés bien en évidence sur une souche se méfiait sans doute…

 Ou alors c’était simplement un homme serviable et gentil avec les marcheurs, qui sait ?

Quand vous promenez votre sac à dos dans un coin que vous ne connaissez pas, guide en main, que penser devant de telles indications :



A droite ou à gauche ? Dans notre cas (eh oui nous étions deux ce jour-là), c’était à gauche…  Mais avouez tout de même que ce n’est pas de bol que deux sentiers « GR de pays » se frôlent au même endroit, imposant ces deux balises perturbantes ! Alors je vous rappelle une règle simple : en plus de connaître la couleur des marques à suivre, n’oubliez pas la carte qui vous tirera d’affaire ! Personnellement je suis une inconditionnelle des IGN, étant tombée dedans quand j’étais petite… Ceux qui sont visés par cette phrase se reconnaitront.

Tout bon  baliseur le sait, il faut repasser de temps en temps. Sinon, avec la pluie, le froid et la poussée de l’arbre année après année, tout passe, tout s’efface. La plaisante randonnée devient alors une course à la balise ! Un petit exemple dans la vallée de Chevreuse :








Ce jour-là, nous n'avons vraiment pas eu l'impression de profiter du charme de la forêt, qui est indéniable; nous avons affuté nos lunettes pour nous assurer en permanence d'être au bon endroit...


Un autre exemple: dans le Morvan, qui montre bien ce que j'ai déjà écrit dans une nouvelle: un arbre, ça a l'air immuable, et ce n'est pas vrai du tout, ça change !





C'est tout pour aujourd'hui. Mais rassurez-vous chers amis, les aventures ne sont pas finies, je reviens dans quelques jours,  avec un ou deux cas rigolos. 

billet numéro 1 ici
biller numéro 2