La semaine dernière, il m’est arrivé une chose étrange : j’ai été
invité à séjourner dans la maison de mes ancêtres. Aucune connectivité, aucune
domotique, j’ai du faire mon lit moi-même et passer l’aspirateur ! Quant à
avoir des nouvelles, il fallait… acheter un journal.
Mais ce ne fut pas le plus dérangeant. Dans cette belle demeure se
trouvait une bibliothèque. Vous ne savez pas ce que c’est ? Dans ce cas c’était
un meuble et une pièce ou on rangeait des livres. Rien à voir avec les livres
que vous connaissez, truffés d’images mobiles, de sons, de musique et d’hyper-liens.
Non. Il s’agissait là de livres imprimés, sur du papier, avec des pages qu’on
tourne. La pièce était belle. Les rayonnages en bois blond sentaient l’encaustique,
le parquet craquait. Quelques fauteuils près des fenêtres invitaient à la
lecture.
Au hasard j’ai tendu la main et attrapé un volume. La couverture rigide
crissait, les pages jaunies, raides, se feuilletaient avec difficulté. Voyage
au centre de la Terre, de Jules Verne. Je me suis assis dans un fauteuil de
velours rouge, j’ai lu. Longtemps. Une sensation incroyable ! Mais une
lecture assez ardue.
Comment visualiser le gouffre dans lequel les hérons descendent, sans
image ni son ? Seulement avec les mots ? Comment faisaient nos
anciens ? Une question qui m’a taraudée un moment… Je me suis dit que la réponse
viendrait peut-être avec une autre lecture.
Au hasard toujours, je suis tombé sur La fée Carabine de Daniel
Pennac. Un style et un genre radicalement différents. Et là encore j’ai trébuché :
ce carrefour ou une vieille dame sort une pétoire, je ne le voyais pas du tout.
Impossible ! J’en aurais pleuré de dépit, je me sentais si bête.
Me voici de retour chez moi, en deux mille trois cent quinze. Des
dizaines de livres connectés sont à ma disposition, aussi bien sur le grand écran
dans mon appartement que sur ma tablette souple, et en projection sur le dos de
ma main. Les lieux, les personnages peuvent être visualisés en hologrammes
autour de moi, la musique ou l’ambiance sonore retentir dans la pièce. Tout s’offre
à moi, à vous, à nous, disponible, concret, mais aussi sans surprise.
Je voudrais retrouver quelques vieux livres. Lire encore et encore, et
arriver à voir par moi-même tous ces univers décrits. Peut-être devrais-je
apprendre à faire mon imagination ?
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