mardi 11 octobre 2022

Qu'est-ce qu'un livre ?

Il y a quelques jours, @lelibrairesecache sur Twitter a publié une des ces anecdotes dont il a le secret :

J’eus l’impudence (l’imprudence ?) de répondre « Un premier achat avec sa CB: des livres ! Elle ira loin cette petite ».  Quelqu’un que je ne connais pas s’est alors ému :


Après examen, il semblerait que c’était une blague de la part de Tintin, mais cela m’a fait réfléchir à cette question : qu’est-ce qu’un livre ?

J’ai grandi à une époque ou un livre, c’était un ensemble de pages reliées avec du texte. La BD était considérée comme un genre sympathique, rigolo, divertissant, mais pas encore comme une culture (je vous parle d’un temps… hein !).

Déjà à l’époque, il existait un clivage entre les personnes qui lisaient, et ceux qui se plongeait dans les romans de gare. Entre la littérature et le reste. On est d’accord, ce clivage persiste.

Depuis quelques années sont apparus ou se sont développés beaucoup de nouveaux genres littéraires (et pardon d’avance à ceux que je vais oublier)

ü  Les livres pour adolescents, très bonne nouvelle car à mon époque il n’y avait que Alice de Caroline Quine ! J’ai adoré à l’époque, mais avec le recul, c’est gentillet…

ü  La chick lit, pas trop mon genre mais si cela donne à des personnes le goût de la lecture, c’est super

ü  Les romans feel good, qui rencontrent un franc succès. J’en ai lu sans savoir que c’en était, comme Le Cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates, par Mary Anne Schaffer et Annie Barrows. Dans tous les genres il y a du bon et du mauvais, de mon côté je lis en ce moment beaucoup de livres qui traitent de fins du monde plus ou moins apocalyptiques, donc vous sentez bien que ce n’est pas trop ce que je cherche comme littérature. Cela dit, même commentaire que pour la chick lit.

ü  Les polars de ma jeunesse, avec une enquête style Hercule Poirot ou commissaire Maigret, ont progressivement fait place aux thrillers, de plus en plus noirs, avec des tueurs qui commettent des crimes de plus en plus sordides, ou révoltants, ou cauchemardesques. J’en ai lu de très bons, je pense par exemple à Au-delà du mal de Shane Stevens, puis je m’en suis éloignée à cause de l’escalade dans l’horreur à laquelle les auteurs se sentent obligés.

ü  Le roman steampunk, dont @schaptal parle régulièrement sur son blog https://www.outrelivres.fr/. Là encore pas trop mon genre, mais parfois je m’y plonge avec bonheur

ü  Les mangas, art japonais assez ancien, très ancré dans la culture japonaise moderne, et rencontrant un franc succès sous nos latitudes.

ü  Le roman graphique. Si je ne suis pas fan de l’adaptation en roman graphique d’œuvres littéraires (j’aime en avoir ma propre représentation mentale), j’ai lu quelques très beaux romans graphiques, comme Le poids des héros de David Sala

Pourquoi vous ai-je emmenés dans ce voyage au cœur des genres littéraires et des genres de livres ? Tout simplement parce que, cher lecteur, j’aimerais te faire toucher du doigt le fait que peut-être comme moi certains genres ne te plaisent pas, mais tu leurs reconnais quand même le statut de livres. Nous leur donnons une place dans la culture commune, en particulier dans la pop culture, concept nouveau qui permet de donner une reconnaissance à de multiples formes d’expressions artistiques accessibles à tous, sans élitisme. Dans cette définition, le manga, parce qu’il touche ses lecteurs, leur fait éprouver toutes sortes de sentiments et leur offre de s’évader du quotidien, peut être considéré comme un livre.

Car après tout, qu’est-ce qui est important pour notre grande communauté de lecteurs ? Sans aucun doute nous aimons partager notre enthousiasme pour tel ou tel roman, tel ou tel essai, et sommes toujours ravis d’en parler, et parfois de convaincre quelques personnes de les lire (c’est un des objets de ce blog d’ailleurs). Mais si nous plongeons tout au fond de notre cœur, peut-être trouverions-nous une motivation plus intime, plus prégnante : voir quelqu’un, un proche, un membre de la famille, un inconnu dans le métro ou le train, tourner des pages pour suivre une histoire est un plaisir, une image qui nous transporte, un lecteur de plus dans notre immatérielle communauté !



 

mardi 4 octobre 2022

les naufragés du métaverse, par Anke Feuchter

 


Le métaverse peut enthousiasmer devant l’immense éventail d’expériences qu’il offre, ou inquiéter car il est capable de vous happer complètement, une addiction dont les prémisses existent déjà avec nos smartphones.

Pour Anke Feuchter, c’est bien un sujet d’inquiétude, qu’elle développe à travers des personnages qui occupent toute la palette des attitudes face à la technologie, du rejet complet à l’immersion complète.

Voici comment est présenté ce roman :

«Les autofictions dont j’étais créatrice et objet, actrice et metteuse en scène, finissaient vite par prendre les rênes de ma vie. Je m’étais ligoté pieds et mains. Nageant dans un bonheur narcissique, je n’en savais rien.» Nous sommes en 2039. La révolution du Métaverse a alors bien eu lieu. Comment retrouver le chemin vers son corps et une vie ‘vraie’ quand on a cédé aux promesses d’un monde où le sublime serait accessible à tous ? Où tout se choisit - jusqu’au moment de réaliser que la liberté sans fin n’est autre qu’une prison sordide ne connaissant que la loi du marché. Le pari d’Océane, la quadragénaire noyée dans le monde du paraître, et d’Yvon, de vingt ans son aîné et loin du Métaverse, sera celui-ci : chercher la reconnexion avec un monde et une nature devenus hautement fragiles.

En 2039, dans la vision de l’autrice, d’autres révolutions que celle du métaverse ont eu lieu. Ainsi, le monde est ravagé par la pollution et le dérèglement climatique, les humains doivent toujours faire face à des virus…

Les personnages mis en scène ici sont très humains, au sens où chacun vit avec ses certitudes, ses doutes, ses peurs. Ils font face du mieux qu’ils peuvent, avec toutes les faiblesses humaines, et finiront par découvrir les vertus de l’entraide, de la reconnexion à son corps et à la nature.

Polyphonique, le texte nous permet de « rentrer » dans la tête des protagonistes, leur histoire, et tout ce qui fait qu’ils en sont aujourd’hui… ou ils en sont. Et en chacun d’eux se trouve un peu de nous tous.

Un récit puissant, une écriture fine et travaillée accompagnent le lecteur sur un chemin qui pourrait être aussi le sien, si par hasard il découvrait grâce à sa lecture que sa propre attitude face à la technologie moderne a des effets négatifs.

Voici donc un roman en phase avec son époque et ses risques, qui interpelle et qui aide à réfléchir, tout ce qu’il me faut en ce moment, et peut-être ce qu’il vous faut, amis lecteurs ?

C’était mon #mardiconseil du 4 octobre 2022 😉