vendredi 30 mars 2012

Royaume des morts, royaume de la poésie


Une visite au Père Lachaise peut être une belle promenade au royaume des lettres. Pas seulement me direz-vous, on y rencontre aussi des musiciens, des savants, des dignitaires de l'Empire... Mais vous me connaissez, j'aime bien parler de ceux qui œuvrent avec leur plume...

Compte tenu de la magie du lieu, de son ambiance feutrée et paisible malgré la foule de visiteurs, de son aspect de parc arboré malgré l'entassement des tombes, comment ne pas s'intéresser surtout aux poètes ? Le lieu semble fait pour eux. Mon coup de cœur personnel va à Jean-Baptiste Clément, auteur de Le Temps des Cerises, qui fait face pour l'éternité au mur des Fédérés. 



Au passage, une pensée émue pour tous ceux à qui cette partie du cimetière rend hommage nous habite: déportés morts dans les camps, républicains espagnols et brigadistes, victimes d'attentat et bien sûr les 147 communards morts mort là en 1871.

Paul Eluard, malgré ses relations chaotiques avec le parti communiste, chemine main dans la main avec Maurice Thorez. 



Comme il l'avait souhaité dans son poème Elégie:
Mes chers amis, quand je mourrai,
Plantez un saule au cimetière.
J'aime son feuillage éploré ;
La pâleur m'en est douce et chère,
Et son ombre sera légère
À la terre où je dormirai.
Alfred de Musset dort sous un saule. 



Dernier poète de ces rencontres, Jean de la Fontaine accompagne sobrement Molière au sein du royaume de la fantaisie au service de la morale. 



La cloche résonne, dirigeons-nous d'un pas nonchalant vers la sortie... pour déboucher dans une rue encombrée de voitures et parsemée de feux rouges, pour sortir d'un univers de paix et de créativité et retrouver brutalement la civilisation moderne. Souhaitons à nos poètes un repos serein à l'ombre des vieux arbres qui veillent sur eux.

mercredi 21 mars 2012

Extrait #3: Leonardo Padura

Ancien flic, bibliophile, le héros se souvient :  

«Mario Conde (…) n’avait jamais osé emporter, à des fins personnelles, un seul livre de la bibliothèque du lycée, alors que Cristóbal avait instauré une exception impensable, en le laissant entrer dans la réserve pour qu’il y fouille à sa convenance et choisisse ses lectures. La conviction que le monde pouvait être un champ de bataille mais qu’une bibliothèque était un terrain inviolablement neutre et collectif s’était enracinée dans son esprit comme l’un des apports les plus beaux de sa vie (…) »

In : Les Brumes du passé, Ed. Métailié

lundi 19 mars 2012

Chêne adolescent #5

Voici enfin la suite, écrite par celle qui se cache sous les pseudos de @ilétaitunevoix sur twitter et Romancière Saviezza sur Facebook.

rappel des premiers épisodes


Suite: 
 Pendant ce temps, les océans, mers et étendues d’eaux n’avaient de cesse, plus que d'envie de rappeler à l’ordre ce ramassis de fossoyeurs terrestres, face à la destruction massive des espérances de rappeler chacun à ses obligations. Personne ne s'en préoccupait. C'est en observant un à un des immeubles marins remporter une victoire silencieuse sur la quête d’évasion des peuples, que trente-sept y ont laissé la vie, presque dans le plus grand silence... Ils étaient plus de vingt plus de cent ils étaient des milliers à pleurer désormais sur leurs erreur, d’avoir voulu, d'avoir tenté d'oublier leur malheur en misant sur leurs petites ou grandes économies à seule fin de se la couler sur la grande bleue et tenter de voir ailleurs si le meilleur s’y trouvait.

Même les eaux de la terre n’ont pas attiré l’affliction justifiée par ces tristes événements. Sur ces lieux sinistrés, aucune estafette de droite, de gauche, du centre, de vert, de rouge, de … Personne et pourtant… Pendant ce temps, un arbre, gros certes, dont on a dit qu'il était de la catégorie des chênes, alors donc, un vieux chêne malade, un leurre, une chimère monétaire, tente pour sa part d’éviter les secousses en passant entre les meetings, les naufrages, les massacres de journalistes, pour tenter de faire oublier qu'après avoir mené le sol de ce monde, il a avec plus que de passion, jouit et abusé de quelques feux de rampe et joyeux joyaux sans contrainte mais avec le soutien de quelques magnats, promoteurs, et autres grands de ce monde. Le vieux chêne s’est politiquement, humainement énucléé dans une sombre chambre, d’une non moins sombre histoire. Médias et masses se sont infiltrés dans les dernières branches auxquelles il a tenté de faire appel pour évoquer sa grandeur passée. Quelle tristesse pour un vieil arbre, mais quel honneur pour la nature. Quelle belle loi que celle de l'immuable éviction des produits malades, condamnés à un pourrissement naturel afin de fourbir terreau et tourbe pour voir refleurir de gauche, de droite, du centre des bois, des plaines et des jardins, ces jeunes glands qui s’enracineront et dont on saura avec le temps s’ils sont faits pour durer.
De nos deux chênes l’un plus que l’autre est appelé à en tomber… de cette volonté de grandir. L’on sait maintenant que seul l’enracinement est la valeur de l'humble. Soyons donc pauvre pour vivre mieux. Mais ne mélangeons pas les propos, ni les candidats à la prestigieuse étole, ni les imposteurs, ni les diffamateurs ne trouveront de place dans le terroir. Qu’est-ce que le chêne sinon un gland à faire germer ? Quel boutonneux se dégagera ?
Le meilleur rassemblement ne procède-t-il pas d’une simple observation de notre mère nature : le jasmin? le chêne ? Et le cèdre aujourd'hui que devient-il ?

qui prend la suite ? 

mercredi 7 mars 2012

Littéraire ou scientifique ?

  Bibliobs a publié récemment un article intitulé « bandes de littéraires ! » (lien). Je l’ai posté sur Twitter, et ce sujet a fait un peu débat. Un littéraire peut-il être scientifique ? Et inversement ? J’ai eu envie de vous raconter une anecdote familiale qui clôt le débat.

  Encore petite (7 ans ?), ma fille me demande un soir à table "dis Maman, raconte-moi l’histoire de Newton et la pomme ?". Me voici donc évoquant la légende du célèbre Isaac, paressant sous un pommier, observant les fruits tomber. Sa curiosité naturelle l’amène à se poser une question que personne ne s’était posée avant : pourquoi, quand la pomme se détache, tombe-t-elle au lieu de rester là ou elle est ? Et paf !il invente la gravité universelle.
  Et ma fille de s’exclamer : "Ben tu vois, les savants et les écrivains, c’est pareil, ils se posent des questions que les autres ne se posent pas !"
  Elle me rappelle alors la rencontre organisée par son école avec Anne-Marie Desplat-Duc, écrivain pour enfants. L’auteur leur avait expliqué comment elle avait imaginé un de ses livres, récit des aventures des fruits, yaourts et autres bouteilles de lait dans un frigo. Elle avait essayé de répondre à une question : "Que se passe-t-il dans ma machine à froid quand la porte est fermée ? Personne ne le sait…"

Voici donc comment littéraires et scientifiques peuvent se rejoindre : ils se posent des questions que la majorité des gens (vous, moi…) ne se posent pas.