mercredi 18 novembre 2015

Mes illusions perdues




J’ai de la chance : je n’ai perdu personne le vendredi 13novembre. Très vite j’ai su que mes proches n’avaient pas été touchés, et assez vite j’ai eu des nouvelles d’amis plus lointains. Cela aurait pu être un soulagement si… je n’avais pas perdu ce soir-là mes illusions, mes rêves, mes espoirs.

J’ai toujours espéré un monde dont tous les citoyens vivraient dans la fraternité, le respect mutuel, et la paix. Peut-être cela vient-il des utopies des années 70, pendant mon enfance. Peut-être cela vient-il d’un héritage familial. Sans doute un peu des deux.

On me fera remarquer ce qu’un tel rêve a d’angélique, voire de naïf. On aurait raison. Mais le propre de l’espoir n’est-il pas de nous faire tendre vers des choses un peu inaccessibles ? Bien sûr de nombreux événements nous éloignaient chaque jour plus de cette utopie : les attentats du 11 septembre, les massacres de Boko Aram, le conflit entre Palestiniens et israéliens, la guerre entre Russie et Ukraine et j’en oublie… D’autres événements ont ouvert la voie : le dépôt des armes annoncé par l’ETA, les printemps arabes, et là aussi j’en oublie… Il faut bien avouer que les attentats de Janvier ont sérieusement entamé mes espoirs. Ceux de vendredi dernier les ont réduits à néant.

Au-delà de l’horreur intrinsèque de ces attentats, j’en veux aux terroristes car ils m’obligent à accepter des décisions qui restreignent les libertés : ou il faut l’état d’urgence, oui il faut plus de policiers et de gendarmes, car nous devons nous protéger. Mais je ne peux pas m’en réjouir.

Je suis antimilitariste, car je pense que toute personne qui s’engage dans l’armée accepte l’idée de tuer un être humain. C’est un choix qui me parait insupportable. J’en veux aux terroristes car ils m’obligent à convenir que nous devons entrer en guerre contre eux, contre Daesch.

Putain, là ils ont un peu gagné.

J’ai perdu mon père il y a un peu plus de deux mois. Au-delà de ma fragilité en cette période personnelle difficile, comment dire à quel point il me manque ? Né en France de parents réfugiés politique après une guerre perdue en Espagne il a passé la première année de sa vie dans un camp de concentration français. Sa vie avait façonné sa vision du monde, et j’aurai tellement voulu parler de tout cela avec lui, tenter de comprendre ce qui se passe avec lui, même si peut-être je n’aurais pas été d’accord…

Et que m’aurait-il dit au fond ? Sans doute la même chose que vous : qu’il faut continuer à vivre, que laisser la peur conduire nos actes serait une trop grande victoire à leur donner. C’est donc ce que je vais faire ! Entre autres, je vais recommencer à vous perler livres, rugby et balades en forêt sur les réseaux sociaux. Et tant pis pour mes illusions perdues !

Mais je veux ajouter une dimension complémentaire : je ne souscris pas à un certain nationalisme ambiant, qui veut de protéger la France. Il faut protéger tous ceux qui sont attaqués. Le Liban a été cruellement attaqué juste avant nous. Demain, à qui le tour ? C’est pourquoi je veux illustrer ce billet avec cette image : le Lennon Wall de Prague, qui devrait parler à tous, dans le monde entier.  
Peace and Love !

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