Cette année il n’y
aura pas de Nobel de littérature, la faute à un abruti qui a agressé des
femmes. Bon, c’est très très très résumé, je vous l’accorde. Plus de détails
ici.
Cela m’a paru être l’année idéale pour vous parler de mon
difficile rapport aux Nobel. Et oui, j’ai du mal à les lire… Mes derniers
contacts avec ces brillants auteurs et autrices m’ont laissé beaucoup
d’amertume : des lectures décevantes, ou trop éloignées de moi, ou un peu
absconses.
Première étape pour écrire ce billet : faire la liste
de tous les Nobel que j’ai lus. Surprise : il y en a seize ! Et
certains dont j’ai gardé un excellent souvenir ! Me tromperais-je
moi-même, cultivant une fausse idée de l’échec, genre pour me rendre
intéressante ? Une seule possibilité pour y voir clair : plonger un
peu plus avant dans cette liste dont l’ordre tient exclusivement au hasard.
Albert Camus
Mauvais souvenir : lecture obligatoire de La Peste, sans doute au lycée. Il me
semble n’avoir rien compris à ce livre. Le magazine Le 1 a célébré récemment L’Etranger, et je me suis demandé si je
n’allais pas tenter à nouveau Camus…
Tony Morrison
Lorsqu’elle a reçu le Nobel, je ne la connaissais pas. Une
romancière noire américaine, voilà qui a titillé ma curiosité. J’ai choisi de
lire Home, que j’aimais beaucoup jusqu’à
l’irruption d’un côté fantastique, ancré dans des croyances de type vaudou, qui
m’a décontenancée… et j’ai décroché.
JMG Le Clézio
Désert, Ourania et un troisième roman dont je ne
me rappelle plus le titre m’ont enchantée. J’aime son écriture et ses sujets,
je crois que je vais en lire d’autres.
José Saramago
Un éblouissement ! Je me suis plongée avec délices dans
l’humour de Saramago, son univers décalé, un peu grinçant mais si juste… Caïn et La lucidité m’ont donné un immense plaisir de lecture. Je vais
aussi explorer plus avant son oeuvre.
Patrick Modiano
Là je dois confesser mon incompréhension totale. Lorsqu’il a
été récompensé, j’ai demandé sur les réseaux sociaux et on m’a recommandé Dora Bruder. Impossible de rentrer dans
ce récit du rien ou presque.
Alice Munro
Je n’ai pas dû choisir le bon livre. Du côté de Castle Rock part sur les traces de sa famille en Ecosse
(passage passionnant) puis suit les ancêtres dans leur émigration vers les
Amériques avant d’arriver à son enfance. Et là je n’accrochais plus du tout.
Imre Kertész
Je découvre beaucoup d’auteurs au moment où le prix Nobel
leur est décerné. Kertész fait partie de ceux-là. Je me suis précipitée sur Etre sans destin, et j’ai découvert,
au-delà du récit de l’internement dans les camps de la mort, qu’être Juif
n’était pas, dans les années 30, quelque chose qui allait de soi. J’ai appris
comment les nazis ont fait de lui, de sa famille et de milliers d’autres des
juifs. Une découverte que je considère comme essentielle.
Mario Vargas Llosa
Je ne me rappelle plus ce que j’ai lu de lui. Je sais juste
que je n’ai pas aimé ses prises de positions contre l’indépendance de la
Catalogne, et surtout au sujet des prisonniers politiques catalans.
Doris Lessing
Là encore je n’ai pas dû choisir le bon livre : Les grands-mères. J’ai de plus en plus
de mal à lire ces romans qui parle des tourments de riches qui n’ont rien d’autre
à faire dans leur vie que de s’occuper de cela. C’est pourquoi j’ai banni
Françoise Sagan de mes piles à lire, et Woody Allen de mes listes de films à
voir.
Gabriel Garcia
Marquez
J’ai relu récemment cent
ans de solitude, que j’avais presque totalement oublié. Quelle ne fut pas
ma surprise lorsque je me suis rendue compte que… ce roman était compliqué,
avec tant de personnages qui portent le même nom, avec des événements
improbables, des
Alexandre Soljenitsyne
Le premier cercle :
un choc. J’avais quelques connaissances sur les dérives totalitaires de l’URSS,
mais les lire décrites ainsi m’a bouleversée.
John Steinbeck
Pour Steinbeck, je ne vais pas être plus originale que pour
Soljenitsyne : Des souris et des
hommes, quel choc ! Une écriture d’une subtilité incroyable au service
d’un roman implacable, un très beau souvenir de lecture.
François Mauriac
Mes souvenirs sont lointains… Très à la mode dans ma
jeunesse, j’ai lu Un nœud de Vipères
et Thérèse Desqueyroux. Je serai
incapable de dire aujourd’hui ce que j’ai éprouvé à l’époque.
Ernest Hemingway
Aaaaah Ernest ! Pas apprécié du tout dans la famille
pour Pour qui sonne le glas, qui se
passe en pendant la guerre civile espagnole, ou la réalité historique est qu’il
n’a quasiment pas dessoulé pendant son séjour, et pratiquement pas quitté son
grand hôtel à Madrid. Il n’a rien connu du front.
Je dois dire que Le
vieil homme et la mer reste un bon souvenir.
Roger Martin du Gard
J’aime bien les grandes sagas, et les Thibault ne fait pas exception. De plus, j’aime bien les
romans historiques qui m’apprennent plein de choses sur une époque ou une
autre, moins arides que les livres d’historiens (qu’ils me pardonnent !)
Rudyard Kipling
Comme beaucoup de gens, je savais qu’il était l’auteur de le livre de la jungle, supposé livre
pour enfant. J’avais donc une certaine méfiance, mais je me suis régalée en
lisant Kim. Ce fut une belle
rencontre entre une lectrice et un auteur.
Cette longue énumération permet de tirer un bilan :
seize Nobel ont fait partie de mes lectures, et sept à huit d’entre eux m’ont
donné du plaisir à lire. S’agit-il d’un bon taux ? Aucune idée, mais cela
me semble assez loin de cette idée de l’échec systématique qui m’habitait. Je
vais d’ailleurs tenter de l’améliorer avec Maryse Condé, qui semble un très
beau Nobel alternatif. Lequel me conseillez-vous ?
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