Un peu en retrait du chemin poussait un chêne. Un tronc presque droit, une ramure équilibrée, il avait tout de l’arbre vénérable. A ses côtés, un rejeton avait pris racine. Haut de deux mètres environ, ses rares branches se jetaient farouchement à l’opposé de son grand frère, comme si une force magnétique les repoussait. Cela lui donnait un aspect tordu et grêle, d’un bel effet comique.
Un observateur passant par là un jour de soleil aurait vite compris que le petit arbre recherchait avidemment la lumière, absorbée par l’abondant feuillage du chêne dominant. Aucune force de répulsion là dedans ! On pouvait imaginer le jeune blanc-bec pestant en son for intérieur, se demandant quand l’autre crèverait et lui laisserait enfin profiter du soleil et se redresser. Et l’observateur aurait eu envie de lui conseiller de ronger son frein…
Des hôtes, il n'en avait pas manqué pourtant.
Un troubadour, ivre de ses strophes, avait bien livré quelques confessions sur des cahiers aux rythmes de guitare. Il avait presque osé graver les petits noms d'Hélène ou de la Jeanne sur le tronc du vénérable feuillu. Virent également de respectables charpentiers songeant à de robustes chevrons, des bûcherons enhardis par le marché du bois de chauffage et même un évêque... Pourquoi un évêque me direz-vous ?
Un projet de création de chapelle dédiée à Sainte Félicie avait cours à cette époque, l'argument majeur semblait se teinter de piété mais le but était bien différent. Il s'agissait de fournir quelques précieux subsides au pauvre diocèse. Après tout, n'y avait-il pas un exemple à Allouville-Bellefosse en Normandie ?
Et le petit chêne, tout tordu, dépossédé de lumière frémissait d'envie à la vue de si augustes personnages. Ce n'est pas sur ces flancs que s'exposeraient les ébauches d'amoureux de passage.
Mais, vint à son tour une dernière visite, sinistre, envahissante, nécrosante pour le bel arbre : la phytophthora ramorum . La maladie s'installa rapidement, infiltrante et pénétrante comme les rayons de soleil de cet automne qui allait s'avérer funeste pour l'un des deux arbres.
Ce furent donc désormais plutôt des spécialistes agricoles, forestiers et pépiniéristes qui défilèrent devant les deux arbres. Il était fascinant de constater comme la maladie semblait les réunir et les prendre tous deux d'une même étreinte. Les troncs, feuillages, branches et écorces des deux arbres portaient les mêmes stigmates : colorations effritantes et crevasses pourrissantes.
Les deux arbres ne semblaient plus se déployer vers le ciel dans des directions opposées mais s'enfoncer ensemble dans le sol d'un même épuisement maladif et des mêmes reflets soufrés. Des photos furent prises, des articles parurent dans la presse locale, puis nationale.
C'est alors qu'on découvrit que le grand arbre avait été planté là par les grands parents paternels de l'un des deux favoris à l'élection présidentielle de 2012 ! Dès lors ce fut une nouvelle vague de visiteurs, journalistes et analystes politiques. Il se produisit une véritable floraison hivernale d'articles sur nos partis politiques, aussi malades que les deux arbres, par le manque de lumière du à la prééminence d'un chef hyper-écrasant et par les crevasses décolorantes dues aux égoïsmes et rivalités permanentes...
Cette suite, écrite par mon ami Alain, nous emmène vers d'autres cieux que ceux de la nature, deux arbres poussant au bord d'un chemin... L'un de vous est-il inspiré pour prendre la plume à son tour ?
Je viens de lire le texte d'Alain.
RépondreSupprimerJe le trouve extra. Il m'a plu. Tant par la "juste suite" que par l'humour "politique" décalé. L'écriture est précise et agréable.
diable la boule de neige s'agrandit....bravo pour les auteurs, l'affaire prend un tour inattendu !!!!
RépondreSupprimerce cadavre exquis arboricole prend véritablement tournure, et c'est un plaisir à lire.
RépondreSupprimerVivement la suite - avant les élections, si possible ;-)
Merci à tous pour vos commentaires., je cherche un repreneur...
RépondreSupprimerAh si je n'étais pas débordé en ce moment et pour les mois à venir...
RépondreSupprimerj'aurai bien aimé que tu participes, mais ce sera pour une autre occasion...
SupprimerAllez on se lance, on se lache un rien,
RépondreSupprimerqui ne tente rien ne récoltera feuille,
à votre bon coeur, pour le chène vaurien,
à votre belle plume, donnez vie à ses feuilles !
voilà bien de quoi encourager la 3ème larrone, merci pour ces mots chaleureux et poétiques !
SupprimerMerci Alain...
RépondreSupprimerJe me lance!