Ceux qui me suivent avec régularité savent combien j’apprécie la SantJordi. Mais quand en plus on m’offre un livre remarquable, cette fête donne
lieu à un vrai bonheur de lecture !
Cette chance m’a été offerte avec le
Cercle des Douze, de Pablo de Santis, résumé ici. Pour ceux qui n’ont pas
envie de cliquer : Douze détectives, liés par l’organisation d’un cercle,
se retrouvent à Paris à l’occasion de l’Exposition Universelle de 1889. Un
crime va troubler leur réunion, sur fond de chantier de Tour Eiffel et de
préparatifs de dernière minute, dans une capitale bouillonnante et déconcertée
par cette construction métallique sans pareille.
Si le roman prend une centaine de pages pour se mettre en place, ce qui
me semble beaucoup, il déroule ensuite une énigme qui m’a tenue en haleine,
avec une galerie de portraits étonnante : j’ai adoré détester ces
détectives arrogants, si mauvais camarades, si peu intéressés par les malheurs
des autres… J’ai aussi pris un grand plaisir à lire quelques passages d’une grande
finesse d’écriture. J’ai relevé pour vous ces perles :
La Tour déployait dans le ciel gris son gigantisme sans objet. Elle semblait faite seulement pour les jours sans nuages, pour être vie de loin et sous la pluie. Quelques années plus tard, pour l’exposition de 1900, entourée d’automobiles, elle semblerait déjà ancienne, mais au temps de sa construction, elle conservait un air de surprise extravagante. Ce qui était prodigieux n’était pas sa hauteur, mais sa fin programmée. Que quelque chose d’aussi gigantesque puisse disparaitre sans cataclysme, comme les pièces d’un jouet qu’on range dans une boîte en bois, projetait autour d’elle une ombre d’irréalité futile. Elle nous susurrait à l’oreille de ne pas prendre la vie trop au sérieux.
Il n’y avait aucun livre dans la maison de Grialet : c’était la maison tout entière qui était un livre. L’immeuble, comme je le sus par la suite, avait appartenu à l’éditeur Fussel, qui avait fait construire portes et fenêtres comme si elles avaient été des couvertures de livres. Les escaliers à colimaçon s’élevaient comme des arabesques ; des pièces imprévues surgissaient de-ci de-là comme des notes de bas de pages ; les couloirs s’allongeaient telles des gloses exagérées.
(l’énigme) était ce qu’elle avait toujours été depuis mon enfance : un puzzle. Mon père rentrait à la maison avec le grand carton enveloppé dans du papier bleu. Devant la fenêtre, j’arrachais le papier, je renversais les pièces sur le sol et je jouissais du spectacle de ce chaos brillant qui attendait qu’on y mette de l’ordre et qu’on trouve, derrière les formes, la Forme.
Bonjour ! J'ai bien aimé aussi. Mais j'ai préféré Crimes et jardins, qui est la suite mais qui peut se lire tout seul aussi (j'en ai parlé sur mon blog). Un vrai régal !
RépondreSupprimermerci du tuyau, je le note avec plaisir pour une deuxième découverte...
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