Cette période de l’année est devenue celle du bilan. Enfin c’est l’idée que je m’en fais puisque les billets identifiés « bilan » ont été publiés à l’été 2013, en janvier 2014, fin 2014 (autant dire janvier 2015), en janvier 2016 et en juillet 2018. Bon en fait c’est un peu quand je veux, quoi. Cela me rappelle le journal de mon école, pour lequel je faisais la mise en page, et dont le rythme de parution nous l’avait fait baptiser « irrégulomadaire ».
Allez, peu importe, on y va, on fait le bilan. Ensuite on passe à 2021 😀
En neuf ans d’existence, ce blog a vu mettre en ligne 225 articles, soit quelque chose comme 2 articles par mois. Bien ou mal on s’en moque, c’est juste pour afficher un chiffre.
En juillet 2018, je constatais avec plaisir que mes billets ont une vie propre (lien) : en gros, après que la pub sur les rézosocios était finie, leur score de lecture continuait à monter gentiment. Eh bien ceci est toujours vrai puisqu’à l’époque A l’Encre Bleu Nuit totalisait 185 lectures par billet en moyenne et qu’aujourd’hui c’est 210 ! Rien ne pourrait plus me réjouir. Savoir que les sujets abordés peuvent toujours avoir un intérêt, c’est flatteur.
L’année 2020 a été spéciale pour moi. Bon je sais, pour vous aussi, mais là je vous parle de mes lectures. Le premier confinement m’a un peu bloquée, et je vous en ai longuement parlé ici (lien). Le deuxième c’était nettement mieux, mais il n’a pas fait l’objet d’un article.
Au final, j’ai lu 34 livres, un peu moins que d’habitude, je tourne plutôt à 37. Les chiffres confirment mon sentiment de blocage, ça rassure quand les chiffres disent la vérité, non ?
Parmi ces lectures, quelques-unes ressortent comme les grands livres de mon année, et au fond c’est ça qui est important, plus que les chiffres. Voici donc mes conseils de lecture :
Et toujours les forêts, Sandrine Collette
Une histoire de fin du monde, qui brûle soudain tout ce qui se trouve à la surface de la terre, et ne laisse survivre que ceux qui étaient dessous, comme le héros qui se baladait dans les catacombes avec ses amis.
Il décidera de retourner auprès de son arrière-grand-mère, au fin fond d’une campagne ou règnent les forêts, puis tentera de repeupler la planète…
Une destruction, une errance puis l’essai d’un nouveau départ : il y a bien entendu du Ravage de Barjavel dans ce roman. Mais il est ancré dans le monde d’aujourd’hui, avec ses grandes faiblesses, dont le dérèglement climatique, et la fin est moins porteuse d’espoir : il ne s’est pas encore créé de nouvelle société.
J’aime beaucoup la plume de Sandrine Collette, et elle est ici d’une force incroyable pour décrire le monde d’avant et le monde d’après ;-) ainsi que l’obstination presque animale du héros, portée par un instinct de survie jamais mentionné mais toujours présent.
Le rire du grand blessé, Cécile Coulon
Formidable histoire d’un monde ou la lecture est devenu un grand spectacle dans des stades, pour calmer les dépressions et susciter des « sentiments ». Les hommes qui assurent la sécurité de ces événements ne savent pas lire et ne comprennent pas ce que cela suscite.
Evidemment un évènement imprévu va mettre un grain de sable, révéler l’envers du décor et permettre un merveilleux hommage à des fleurs pour Algernon, de Daniel Keyes (que je recommande vivement !)
Le cœur de l’Angleterre, Jonathan Coe
Excellent, une chronique qui court de 2010 à 2018, en suivant les personnages on voit l’Angleterre se déchirer progressivement. Chez eux ça a donné le Brexit, chez nous les gilets jaunes. Tès instructif, en plus du plaisir de retrouver les personnages de Bienvenue au club, quarante ans plus tard
Voyage d’hiver, Jaume cabré
Que dire ? juste : « prodigieux ».
Un ensemble de quatorze nouvelles qui s’appellent et se répondent, utilisant les mêmes personnages, le même contrepoint musical surprenant de Kaspar Fisher, la présence de Schubert ou de Rembrandt Van Rijn, même si les textes se situent dans les lieux et des temps différents, La Catalogne, Oslo, Vienne, …
Pour réussir un exploit pareil, il faut une maîtrise incroyable des textes, qui annonce Confiteor, roman d’une merveilleuse complexité, qui fait appel également à la présence de la musique, la multiplicité des lieux et des époques. Pour moi, cet auteur est un géant de la littérature actuelle.
la discrétion, Faïza Guène
Ce roman suit une femme née en 1949 en Algérie, grandie dans un pays déchiré par des guerres, puis mariée à un homme immigré en France, ou grandiront ses quatre enfants. Il explore comme une femme un peu révoltée pendant ses jeunes années devient, petit à petit, une femme effacée, qui essaie de se fondre dans le paysage, dans une France qui ne veut pas vraiment d’elle ni de ses enfants. Comment la discrétion devient pour elle la grande vertu, comment ses enfants deviendront frustrés par la vie qu’ils mènent, pas celle qu’ils auraient rêvée, une vie pleine de renoncements, de déceptions, et de difficulté à trouver leur place.
La colère refoulée par la mère est le terreau dans lequel ses enfants ont grandi, et elle pourrait exploser en eux.
L’écriture est simple comme les gens dont elle parle, d’une très grande finesse sur leurs sentiments, tout ce qui fait les petites et les grandes humiliations du quotidien. A petites touches, l’autrice aborde de nombreux sujets de société, et sans brutalité a tendance à gratter là où cela fait mal. Une des très belles surprises de cette rentrée littéraire !
(nota : je vous copie-colle ici mes notes perso, elles sont longues ou courtes mais elles concernent toutes des livres exceptionnels !)
Un autre point marquant de l’année 2020 est … que j’ai lu des essais ! Je suis une fervente du roman. J’adore la fiction, et pour peu que l’auteur ait fait un vrai travail de recherche, j’apprends plein de choses en lisant du roman. Mais parfois… l’essai est irremplaçable. Sauf que souvent c’est dur à lire, un essai. Je l’avoue : j’ai souvent du mal. Parfois le vocabulaire, parfois la façon dont les choses sont expliquées me posent problème. Et pourtant cette année j’ai lu :
- Henri-David Thoreau, la désobéissance civile
- Je chemine avec Gilles Clément
- Frédéric Lenoir, Vivre ! dans un monde imprévisible
- Jacques Tassin, penser comme un arbre.
- L’indépendance catalane en questions, Peloille/Buj/Trepier (commencé en 2020, fini en 2021)
Un superbe score ! J’ai été troublée par Thoreau, même si son acte de désobéissance civile est tout petit par rapport à ceux des activistes actuels qui se réclament de lui, et fascinée par le livre de Jacques Tassin qui déconstruit des idées proposées par un certain forestier allemand, qui me paraissaient… trop anthropocentrées.
Frédéric Lenoir propose des pistes intéressantes pour faire
face à la crise actuelle et peut aider beaucoup d’entre nous, Gilles Clément
est aussi une source d’inspiration, dans un registre différent !
L’essai sur l‘indépendance catalane m’a semblé partisan et m’a agacée.
Mais au final, ces lectures m’ont toutes enrichies, différemment de ce que ferait un roman, et je suis très fière d’en entre venue à bout !
L’année 2020 est finie, 2021 sera sans doute encore une année difficile, mais point de vue lecture je me sens plus armée. J’ai une belle PAL (1), et la franche envie de lire ces livres qui parfois m‘attendent depuis… des années ! Mais les fidèles lecteurs de ce blog le savent déjà, j’en ai parlé en 2013 ici. Depuis je n’ai pas changé, si ce n’est que ma PAL est beaucoup mieux rangée.
Je vous souhaite une année riche en belles rencontres littéraires, pour le reste de votre vie ça ne me regarde pas ;-)
PS : merci à Valérie qui se reconnaitra pour ses conseils de lecture en 2020 (Cécile Coulon et Frédéric Lenoir cités ici), et à Philippe Poulet pour le conseil sur Jacques Tassin.
(1): Pile A Lire
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire