vendredi 12 février 2016

Réforme de l’orthographe


Je ne l’aime pas, cette réforme. Enlever des accents circonflexe ou des traits d’unions, c’est séparer ces mots de leurs origines.
J’aime bien l’accent circonflexe d’hôpital qui le relie à hospitalier, ou celui de goût qui le relie à déguster. J’aime bien écrire clef (et non pas clé, mot qui n’a pas d’esthétique graphique), en pensant aux claveaux d’une voûte, et à son clavetage… 



En CM1 / CM2, notre institutrice nous faisait plancher sur les familles de mots : elle nous soumettait un mot, à nous de trouver un maximum de mots ayant les mêmes racines. J’adorais ce jeu, et j’ai beaucoup appris grâce à lui. Ainsi je me souviens avoir découvert le lien entre feu et ignifugé.  Elle nous enseignait aussi à reconnaitre les préfixes et les suffixes autour du radical. J’ai alors compris le sens du « a » privatif (amoral), du « in » négatif (inattention), etc… cela m’a toujours aidée, lorsque je tombe sur un mot que je ne connais pas, à en deviner par intuition le sens. Depuis cette époque, l’accent circonflexe n’a plus de secrets pour moi ! Comme quoi on peut enseigner les choses de façon simple.

Ceci dit il faut bien reconnaître qu’il y a des mystères dans son utilisation : pourquoi icône / iconoclaste ? pourquoi déjeuner / jeûner ? A cause de ces subtilités incroyables du français, qui font que toute règle a des exceptions, comment arriver à maîtriser le français dans toutes ses complications ? (Autre question : comment demander à des jeunes de respecter des règles de vie en société, sans exception, quand la langue française elle-même n’en est pas le modèle ?)

C’est pourquoi je n’ai pas fait de foin sous prétexte que cette réforme s’applique, vingt-six ans après avoir été décidée. Elle ne résoudra en rien le problème de la difficulté d’apprentissage de la langue à l’école, mais elle ne dénature pas la langue. Bien moins en tous cas que la création de mots qui écorchent l’oreille, comme lors de la féminisation des noms de profession : ah, auteure ! ah, écrivaine ! et la subtilité Madame la générale et Madame le général ! Dans certaines entreprises, on ne sait pas encore si on doit dire Mme la directrice ou Mme le directeur. Quand à sage-femme, il n’a pas trouvé son pendant masculin…On recommande le mot maïeuticien, mais alors il faudrait dire maïeuticienne pour une femme !

Tout ceci pour dire qu’une harmonisation de certains usages de la langue française serait la bienvenue… à condition de ne pas créer encore plus de soucis !

Ici, le principal souci vient de ce que cette réforme n’est pas obligatoire. Un certain nombre de mots auront donc deux orthographes. D’ici peu vont jaillir des incompréhensions entre ceux qui auront appris la vieille orthographe et ceux qui auront appris la nouvelle. Ma crainte est que se crée une éducation nationale à deux vitesses : aux établissements huppés l’ancienne orthographe, pseudo-gage d’intelligence, aux établissements défavorisés la nouvelle.la connaissance de l'orthographe devenant ainsi un marqueur social de plus.

Dans une France qui prône Liberté, Egalité, Fraternité, il ne devrait exister qu’une seule orthographe enseignée à l’école.

1 commentaire:

  1. Certes, une langue évolue, mais naturellement, et pas en la tronquant volontairement.
    Je considère cette idée comme l'aveu de l'échec de l'apprentissage de la langue, et ce n'est pas à sa difficulté qu'en revient le blâme, mais à la façon de l'enseigner.
    Tes grand-mère et arrière-grand-mère écrivaient un Français impeccable, en ayant pourtant quitté l'école très jeunes.

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